Bernard Arnault en passe de mettre la main sur Paris Match
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Paris - Le géant français du luxe LVMH est entré en négociations exclusives avec Lagardère pour racheter Paris Match, scellant l'entente entre les milliardaires Bernard Arnault, qui rêve de s'emparer de l'hebdomadaire depuis des années, et Vincent Bolloré.
Lagardère "a reçu une offre d'achat concernant le titre Paris Match émanant du groupe LVMH", a annoncé mardi le groupe de médias officiellement passé dans le giron de Vincent Bolloré en novembre.
Le conseil d'administration de Lagardère "a décidé d'entamer des discussions exclusives" avec LVMH, a déclaré Lagardère, à l'occasion de la publication de ses résultats annuels.
Contacté par l'AFP, LVMH a confirmé cette information, sans apporter davantage de commentaires.
Déjà propriétaire des quotidiens Le Parisien et Les Echos, et actionnaire minoritaire de Lagardère, Bernard Arnault convoite de longue date l'hebdomadaire, pour lequel il avait déjà fait, en 2021, une offre qui concernait aussi le Journal du dimanche (JDD), autre titre emblématique du groupe Lagardère.
La vente "prendra sans doute du temps" et devrait probablement passer par des discussions avec les syndicats de Paris Match, a indiqué Arnaud Lagardère, PDG du groupe éponyme, lors d'une conférence téléphonique.
"Trophée de la réconciliation"
Cette annonce survient alors que le pôle médias de Lagardère (Europe 1, Europe 2, RFM, JDD, Paris Match) affiche un recul de son chiffre d'affaires de 9% en 2023.
Elle a créé la surprise, trois mois après la cession de Gala au groupe le Figaro.
Vivendi avait cédé son magazine people afin de répondre aux exigences de l'UE pour racheter Lagardère, et ainsi conserver Paris Match, titre vendu à près de 450.000 exemplaires chaque semaine en 2023, selon l'Alliance pour les chiffres de la presse et des médias (ACPM).
Pour autant, la vente de Paris Match "était dans les tuyaux depuis quelques semaines ou mois", a affirmé un journaliste de l'hebdomadaire interrogé par l'AFP, évoquant un "pacte de non-agression" conclu entre Bernard Arnault et Vincent Bolloré.
"Les discussions" entre les deux hommes et leurs enfants "ont toujours existé", a commenté une source proche des sphères Bolloré et Lagardère. "Les familles Arnault et Bolloré ne voulaient pas se fâcher, le trophée de la réconciliation, c'est Match."
Selon la même source, "Bernard Arnault a une volonté très forte, depuis longtemps, d'intégrer Match dans son groupe", car c'est "une marque qui porte une grande partie de la France".
"75 ans au printemps"
En outre, le milliardaire et le magazine "sont nés le même mois de la même année" en mars 1949: ils fêteront tous deux "leurs 75 ans au printemps". Et le chef d'entreprise partage sa ville de naissance, Roubaix, avec celle du fondateur de Paris Match, Jean Prouvost, relève cette source.
Ce cadeau d'anniversaire sera-t-il perçu comme tel par la rédaction de Paris Match, qui s'est inquiétée à plusieurs reprises d'ingérences de Vincent Bolloré dans sa ligne éditoriale ?
"C'est forcément une bonne nouvelle", estime le journaliste interrogé par l'AFP, assurant à titre personnel n'avoir jamais subi de pressions. "Je préfère avoir un actionnaire qui ne soit pas aussi marqué politiquement", a-t-il justifié.
"Je ne voulais pas que Vincent Bolloré fasse de Paris Match ce qu'il a fait de CNews et du JDD", devenus "des tribunes d'une droite très conservatrice voire plus si affinités".
Tous les principaux médias du groupe Lagardère ont connu des remous depuis que Vincent Bolloré en est devenu l'actionnaire principal. En 2021, Europe 1 s'est vidée de sa rédaction après une grève historique, un scénario qui s'est reproduit deux ans plus tard au JDD.
Reste à voir quel sera l'impact de la vente sur l'organisation de Paris Match, rejoint notamment en 2022 par la figure de CNews, Laurence Ferrari. "Je ne vois pas comment elle pourrait rester à Match, à moins de quitter CNews", pronostique le journaliste.
Les collaborateurs de l'hebdomadaire peuvent quitter le titre depuis son rachat par Vivendi, via une clause de cession, qui perdurera au-delà de novembre, en cas de nouveau rachat par LVMH.
Des craintes au sein des rédaction des Echos et du Parisien ont surgi ces derniers mois quant à leur indépendance vis-à-vis de leur actionnaire. (AFP)