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À travers des tissus patrimoniaux, le Musée du Quai Branly met à l’honneur l’ayahuasca

By Florence Julienne

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Culture

Visions Chamaniques Crédits: © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Léo Delafontaine

L’exposition « Visions Chamaniques » qui se tient au Musée du Quai Branly jusqu’au 26 mai 2024, rend grâce à une plante psychotrope, l’ayahuasca, interdite en France. Ce, à travers une série d’œuvres (tableaux, films, archives) et des tissus dont les motifs, appelés kenés, sont réalisés sous emprise et enregistrés au patrimoine culturel par le Pérou.

Avant toute chose, il convient de préciser que le titre de l'exposition « Visions Chamaniques » fait référence aux chamanes, or, il n’y a pas, à proprement parlé, de chamanes au Pérou. « Pour résumer : « chamane » n'est pas un terme vernaculaire (propre à un pays, à ses habitants) amazonien (c'est un terme issu d'un mot sibérien) mais une catégorie descriptive mobilisée par l'anthropologie afin de désigner les spécialistes des rituels des groupes autochtones de la région (et d'ailleurs), indique David Dupuis, commissaire de l’exposition.

En réalité, au Pérou, on parle de « guérisseurs » (curanderos en espagnol) ou « ayahuascero » pour les spécialistes de l’ayahuasca. Mais il est vrai que le terme « chamanes » est plus porteur, le tourisme autour des expériences chamaniques se développant à vitesse grand V en Amérique Latine. « Au contact de la clientèle occidentale, certains guérisseurs ou autochtones se présentent désormais eux-mêmes comme « chamanes », signale le commissaire d’exposition.

Cette mise au point effectuée, l’exposition porte à s’intéresser à des motifs géométriques et organiques complexes, les kenés, qui ornent les habits, les bijoux, les accessoires, mais aussi les peaux (tatouages) et objets des Shipibo-Conibos, peuple autochtone d'Amazonie qui vit dans le département d'Ucayali au Pérou.

Visions Chamaniques Crédits: © The Shipibo- Conibo Center

Kenés : des motifs perçus dans des visions induites par l’ingestion de plantes de pouvoir (rao) psychotropes

L’exposition explique que la réalisation des kenés est traditionnellement réservée aux femmes. Après avoir ingéré le breuvage à base d’ayahuasca, quelques gouttes du jus de piripiri (piment) sont déposées dans les yeux et le nombril de jeunes femmes au cours de pratiques rituelles. Le but : leur donner la capacité de voir les kenés dans leurs transes, de les exprimer à travers leurs chants (shinan) et de les reproduire avec habileté.

Les jupes (chitontes) portées par les femmes font l'objet d'un soin tout particulier : les kenés peuvent y être peints à l'aide de teintures naturelles ou d'encres industrielles, brodés sur un tissu de coton ou tissés au métier avec des fils de différentes couleurs. Ces pièces, qui nécessitent de nombreux mois de travail, sont considérées comme le sommet de l'art du kené.

Visions Chamaniques Crédits: © David Díaz Gonzales /Isá Rono / Courtesy de l’artiste

En plus de leur aspect esthétique, les chitontes peuvent également être utilisées pour transmettre des informations sur l'identité ethnique, le statut social, l'âge et d'autres aspects de l'individu qui les porte. Ils sont un élément important de l'expression culturelle et de la préservation des traditions.

Aussi, en 2018, le gouvernement péruvien a officiellement reconnu le kené comme patrimoine culturel immatériel du Pérou, introduisant ainsi son importance culturelle et son héritage pour les communautés autochtones de l'Amazonie péruvienne.

Musée du Quai Branly