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Tim Walker : « Nous sommes tous des performeurs »

By Julia Garel

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Culture

De g. à d. : Tim Walker at the V&A, London 2019 Photo by Sarah Lloyd © Tim Walker Studio / Tim Walker, "Tilda Swinton", Renishaw Hall, Derbyshire, 2018 © Tim Walker Studio.

Rotterdam - Au Kunsthal Rotterdam, aux Pays-Bas, vient de s’ouvrir une exposition immersive dédiée à Tim Walker. Célèbre photographe de mode, l’artiste anglais déploie une iconographie fantastique qui convoque nostalgie d'enfance et questions d’identités.

Tim Walker: Wonderful Things

Ce vendredi matin, lorsque Tim Walker arrive à la conférence de presse du Kunsthal Rotterdam, il est accompagné de l’équipe du Victoria & Albert museum, avec qui il a réalisé l’exposition, ainsi que de sa maman. La présence de cette dame assise au premier rang de l’assemblée rappelle combien l’enfance du photographe a influencé son travail. L’émerveillement de ses jeunes années ne l’a jamais quitté et c’est justement ce sentiment d’ébahissement que l’exposition Tim Walker: Wonderful Things entend ranimer chez le visiteur.

Né dans l'Angleterre des années 1970 Tim Walker a travaillé dès ses 18 ans dans les archives du groupe américain Condé Nast. C’est là qu’est né son intérêt pour la photographie, en découvrant les images du photographe et costumier Cecil Beaton. Des années plus tard, son amour des archives est toujours aussi vivace. Pour faire éclore l’étincelle créative, le photographe a mené un travail de recherche en arpentant les kilomètres de couloirs du V&A, sélectionnant ici et là une masse d’objets éclectiques. Des heures de discussions avec les conservateurs du musée plus tard, Tim Walker a inventé des images enchanteresses, inspirées d’une poignée d’artefacts anciens choisis par ses soins.

« Chaque photo est une tentative pour capturer l'émotion que j'ai ressentie en rencontrant ces objets et les histoires qu'ils ont évoquées dans mon esprit », peut-on lire sur l’un des cartels de l’exposition. Tim Walker en a rédigé chacun des textes. Ses confidences, déposées à l’attention du visiteur, communiquent avec brio son enthousiasme.

Dans une salle tapissée de papier-peint rose trône une clé dorée de 1680. Tim Walker explique avoir vu en elle l’expression du besoin universel de se créer un monde intime, où se déploient ses envies, ses rêves et sa fantaisie. « Nous avons tous le besoin de conserver nos secrets dans un monde privé que nous aimons. Un journal intime, un album, ou même un téléphone », écrit-il. De cette clé est née une série de photographies, Box of Delights, mettant en scène le mannequin James Spencer dans un monde enchanteur et vêtu de pièces féminines.

Tim Walker, "Box of Delights" James Spencer and Harry Kalfayan as faun in 17th-century-casket garden. Fashion: Walter Van Beirendonck Costume: Shona Heath London, 2018 © Tim Walker Studio

Plus loin, les vitraux du V&A éclairent une pièce sombre et marquent le point de départ d'une nouvelle série photographique, Lil Dragon. Tim Walker raconte avoir été touché par ces décors colorés et confie que la couleur rouge baignée de lumière lui fait penser à sa mère. Il raconte : « Quand j'étais petit, elle a confectionné cinq grands abat-jours en soie rouge pour notre salon. Une chaude lueur se dégageait de la maison les soirs d'hiver. Pour moi, cette couleur représente le retour à la maison. »

Au-delà des objets issus des collections du V&A, Tim Walker rend hommage aux conservateurs du musée dans une section titrée Handle with care comprenant, entre autres, une robe Alexander McQueen enveloppée avec poésie dans du papier de soie. Lors de la conférence, il explique être touché par le travail des curators : « J'ai trouvé que l'idée de la conservation en tant que geste humain pour l'avenir était porteuse d'espoir car elle signifie qu’il y a un avenir ». Un avenir dans lequel « les gens auront un rapport à la beauté comme nous aujourd’hui ».

Tim Walker “Handle with Care”, Karen Elson, Sgàire Wood & James Crewe. Fashion: The Row, Saint Laurent by Anthony Vaccarello, Daniela Geraci, Sarah Bruylant and Molly Goddard London, 2018 © Tim Walker Studio

La beauté selon Tim Walker

L’idée de la beauté est partout dans le travail de Tim Walker et son opinion sur la question est claire : « Le véritable secret de la beauté est d’être soi-même », déclare-t-il. Il ajoute : « Être qui vous êtes est ce qu’il y a de plus intéressant ». Il explique ainsi être attiré par les nouvelles beautés, celles que l’on a pas (encore) l’habitude de voir.

« Ce qui m'intéresse, écrit-il, c'est de faire tomber les frontières que la société a créées pour permettre de célébrer des types de beauté plus variés et la merveilleuse diversité de l'humanité ». D’ailleurs, chez Tim Walker, l’outil Photoshop, souvent utilisé dans la mode pour raffermir une cuisse ou affiner un ventre, est proscrit.

Ses photographies mettent en scène des corps de tout type : des courbes voluptueuses de Beth Ditto, aux traits androgynes de Tilda Swinton en passant par le visage de Melanie Gaydos, mannequin atteinte d’une maladie génétique. Ses sujets sont pour la plupart aussi célèbres que lui, mais il confie pourtant aimer photographier des gens moins habitués aux projecteurs. Selon lui, en vivant en société, « nous sommes tous, naturellement, des performeurs, bien plus que ce que nous pensons ».

Tim Walker: Wonderful Things, au Kunsthal Rotterdam. Du 24 septembre 2022 au 29 janvier 2023.

Tim Walker, "Why not be oneself?". Tilda Swinton. Fashion: Gucci, Marc Jacobs, Vela, UNOde50, A. Brandt + Son, Lisa Eisner Jewelry Renishaw Hall, Derbyshire, 2018 © Tim Walker Studio
Exposition
Tim Walker