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Comment l’Afrique bouscule la mode

By Céline Vautard

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E-shops, boutiques et marques sont de plus en plus nombreux à mettre à l’honneur la création africaine. Analyse d’un phénomène qui prend de l’ampleur.

Après un déferlement d’expositions ayant mis en lumière l’Art Africain passé et présent (Art/Afrique, le nouvel atelier à la Fondation Louis Vuitton ; Afriques/Capitales à la Villette ; Trésors de l’Islam en Afrique à l’Institut du monde arabe ; sans parler de la récente foire Art Paris Art Fair au Grand Palais ou la foire AKAA au Carreau du Temple), désormais Paris s’intéresse de près à la mode africaine. Plusieurs initiatives misent en place récemment témoignent de cet intérêt.

Contre une vision exotique

Ainsi, dans le très chic huitième arrondissement de la capitale, au 93 rue du Faubourg Saint Honoré, Nelly Wandji a inauguré depuis quelques mois sa galerie dont le but est de valoriser les créateurs et designers africains. Après avoir lancé la plateforme online MonLook en 2014 et testé deux boutiques éphémères, la Française d’origine Camerounaise a décidé de poser ici ses valises afin d’être « une passerelle entre Paris et le continent africain. » « Pourquoi ici ? Parce que je souhaitais amener les marques et créateurs que je représente vers une autre clientèle, explique t-elle. À l’image par exemple d’Imane Ayissi qui vit depuis 20 ans à Paris et réalise de la couture et du prêt-à-porter haut de gamme, beaucoup de créateurs africains peuvent rivaliser avec des griffes de luxes. »

Il faut dire que les clichés sont durs. Alors que la mode du Wax bat son plein et que ce tissu emblématique de l’Afrique est utilisé par de nombreuses marques (Maison Château Rouge, Panafrica, OWL Paris …), certains trouvent cette mode réductrice.

C’est le cas d’Emmanuelle Courreges dont la toute nouvelle plateforme en ligne Lago54 a pour ambition « de mettre en valeur la création et l’étendu des savoir-faire africain. » « Je suis est née en Afrique et j’ai vécu presque vingt ans entre le Cameroun, le Sénégal et la Côte d’Ivoire, raconte t-elle. Je suis restée très attachée à ce continent, mais en tant que journaliste j’ai toujours été frustrée de ne pas pouvoir parler de ce que je connais. Tout ce que l’on voit actuellement en matière de mode, me semble cheap, réducteur et ça perpétue une image has been. Mon idée est tout simplement de montrer que la future Isabel Marant ou le prochain Alexis Mabille est parmi les jeunes labels que je repère. »

Sortir des clichés

À la fois journaliste, acheteuse mais aussi agent commerciale, Emmanuelle porte aujourd’hui une triple casquette et se donne toute entière à sa mission. Lancée en juin dernier, Lago54 (c’est « la go », la nana, la fille dans le langage populaire ivoirien et 54 comme le nombre de pays qui forme le continent africain) représente aujourd’hui 16 créateurs qui sont tous des coups de cœur de l’entrepreneuse. Parmi ceux-ci figurent les créations en tissu Kente de I.AM.ISIGO, les imprimés audacieux d’Orange Culture, les robes déstructurées de Meena… Des créateurs nés an Afrique mais ayant tous acquis une solide culture de la mode auprès de grandes écoles. Ainsi Adebayo et son label Orange Culture ont été nominé lors de la première édition du Prix du meilleur jeune créateur de LVMH, en 2015. Il défile à Londres, Cape-Town et Lagos, la ville où il vit, qui l’a vu grandir et qui l’inspire. Bubu Ogisi d’I.AM.ISIGO s’est formée auprès d’Esmod Paris et vit aujourd’hui entre Lagos et Accra et revisite dans ses collections le tissage traditionnel de son pays. Quant à Loza Maleombho, si elle est née au Brésil et a grandi à New-York, c’est sur les bords de la lagune Ebrié, à Abidjan, qu’elle a choisit de vivre et travailler pour mieux s’inspirer du patrimoine culturel ivoirien. Solange Knowles et Beyoncé sont déjà des adeptes de ses créations ! « Lago54 est un projet “politique“ dans le sens où le but est de célébrer le luxe made in Africa, les jeunes labels branchés, à contrario de produits issus du mass market, des marchés, assure Emmanuelle Courreges. Mon projet a pour vocation de dé-cadenasser durablement les imaginaires sur la création africaine. »

Idem pour Nelly Wandji dont la mission est « la quête de création africaine d’exception. » Celle-ci a déjà exposé et vendu le travail de créateurs tels que Imane Ayissi (Cameroun), Selly Raby Kane (Sénégal), Uchawi (République Démocratique du Congo), ZYNE (Maroc), Delasebure (Burkina Faso), Saks Corner (Afrique du Sud), dont nombre se décrivent comme “Afropolitain”.

Séduire la scène internationale

Et plus que l’Afrique, c’est bien le terme afropolitain qui distingue aujourd’hui cette nouvelle scène créative. Apparu en 2005 avec l’article de l’écrivaine nigériane/ghanéenne Taiye Selasi, “Bye-Bye Babar”, “Afropolitain”, celui-ci décrit une nouvelle génération d’Africains, créatifs, politiquement conscients, émigrants Africains multiculturels avec des racines fermement ancrées sur le continent africain et le corps et l’esprit ouverts sur le monde. Une façon d’être que revendiquent bon nombre de créateurs africains en quête de reconnaissance internationale.

Pour les y aider, le prochain challenge de Lago54, sera de venir la presse et les acheteurs à son premier showroom organisé du 9 au 12 septembre 2017 à l’Atelier Meraki (Paris, 11e ). Celui-ci réunira 15 marques de la jeune garde créative africaine. Quant à la galerie de Nelly Wandji, elle se transformera également en showroom durant la prochaine Fashion Week parisienne (26 septembre - 3 octobre 2017) pour faire connaître ses créateurs fétiches.

Photos: Visuel dans les rues de Paris Lago54 ©Olivier Rimbon Foeller – La Galerie de Nelly Wandji – Portrait d’Emmanuelle Courreges.

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