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COP21 saga (II) : Universal Love veut fédérer l’industrie textile pour une mode plus responsable

By Céline Vautard

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Avec l’événement « Changer la mode pour le climat », qui s’est tenu à Paris les 7 et 8 décembre, l’association se veut fer de lance d’une réflexion et d’actions entre les acteurs du secteur textile et les consommateurs. Objectif : la signature d’une charte de Bonnes Pratiques et d’engagement de la mode pour le climat.

« Le marché de l’industrie textile et de l’habillement est le deuxième au rang des activités économiques mondiales après l’industrie du pétrole, mais c’est aussi l’une des plus polluantes au monde », rappelle Hélène Sarfati-Leduc, consultante experte Développement Durable et RSE en Mode Luxe et Textile, en préambule de l’événement « Changer la mode pour le climat ». Grande consommatrice de matières premières, d’eau et d’énergie, l’industrie de la mode contribue donc pour une grande part aux émissions de gaz à effet de serre, aussi bien au niveau de la production, du transport, que de l’entretien de nos vêtements.

Comprendre l’impact des étapes de conception

L’idée était de frappé fort, en plein COP21, afin de montrer les initiatives françaises pour lutter et optimiser les impacts de la mode sur l’environnement. Autour de six tables rondes organisées autour du cycle de vie d’un vêtement (du Design/Conception, aux Matières Premières, à la Filature/Tissage/Ennoblissement, en passant par la Distribution, l’Entretien de nos vêtements, le Recyclage/Fin de vie, jusqu’au Futur et ses innovations), la journée de lundi 7 décembre a eu pour but d’expliquer les enjeux du secteur pour une production plus durable.

« Nous avons rassemblé fédérations et créateurs de mode pour enfin faire entendre notre voix sur ce sujet, explique Isabelle Quéhé, présidente de l’événement. Les Anglais sont fédérateurs en matière de mode éthique, et Paris, Capitale de la mode, se devait de s’exprimer à son tour ».

Autour de Ségolène Royal, Ministre de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie, qui est venue signer la charte mardi soir, de nombreuses fédérations, industriels, écoles de mode, bureaux de style et créateurs ont répondu présent. Parmi ceux-ci, les présidents de l’Union des Industries Textile (qui réunit 850 entreprises) et de la Fédération de la maille et de la Lingerie (22 000 salariés pour un chiffre global de plus de 4 milliards d'euros), les sociétés Verne & Clet, les Filatures du Parc, le Groupe Eram, l’IFM, le bureau de conseil Martine Leherpeur, les marques Sakina M’Sa, Picture Organic Clothing, Freitag, L’Herbe Rouge ou encore 1083…

Chacun y est allé de son expertise pour faire passer son message. « Il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises matières, mais il faut surtout qu’il y ait les bons usages », rappelle Samuel Meyer, directeur du pôle National Eco-Conception. En effet, souvent les matières naturelles à l’image du coton, consomment plus d’eau que d’autres chimiques et nécessitent l’emploi de pesticides et même le lin, matière écologique par excellence, ne trouve plus guère que de tisseurs en Chine et un peu en Italie… « Aujourd’hui, le créateur doit être conscient des conséquences de ses choix et avoir les outils pour calculer les impacts de son sourcing », souligne Nathalie Ruelle, de l’IFM.

Une industrie du gâchis

« Il faudrait valoriser la laine de nos éleveurs français, interpelle Annick Souyri, de l’Atelier Laines d’Europe, ils sont trop nombreux à brûler cette fibre faute de débouchés et de valorisation ». « L’engouement pour le cachemire et les dérives vers une production de masse à petits prix ont entraîné un déséquilibre des éco-systèmes (surpâturage, désertification…) en Mongolie et en Chine. C’est un drame pour les peuples qui élèvent cette chèvre », alerte Cécile Lochard, fondatrice de l’agence Citizen Luxury. « 600 000 tonnes de vêtements sont mis sur le marché chaque année et seulement 28 pour cent sont recyclées. Il y a encore trop d’articles qui vont à l’incinérateur ou à l’enfouissement », explique Hatem Sedkaoui directeur général de N.T.A/Federec Textile qui collecte les tissus. Créatrice travaillant à partir du recyclage de vêtements, Sakina m’Sa s’est très vite rendue compte des responsabilités d’un styliste. « En frappant à la porte des grandes maisons, j’ai appris que ce sont plus de 50 000 mètres de tissus qui sont brûlés par an et par marque. En tant que consommateur citoyen, nous sommes tous responsables de cela et on ne peut pas tout mettre sur le dos de la fast fashion », confie celle-ci.

Des solutions multiples

Heureusement, l’optimisme reste de mise avec de nouveaux débouchés et innovations. « Le grand problème est lié à la non connaissance des choses. En France, nous pouvons être fiers d’être le troisième pays à recycler le mieux », souligne Serge Crutel, ingénieur textile.

Le recyclage justement fait partie des débouchés importants. « On est aujourd’hui capable de faire du fil recyclé à partir de la maille, de faire de nouveaux jeans avec des anciens, explique Fabrice Lodetti, directeur des Filatures du Parc qui travaille notamment avec Bonobo (groupe Beaumanoir). A l’achat, les matériaux recyclés coûtent même moins chers que les neufs ». Chez Gemo (450 points de vente), on a prouvé qu’investir pour faire des économies d’énergie c’était payant. « Chaque année, l’enseigne dépense 20 millions d’euros pour sa facture d’énergie. Après 30 000 euros d’investissements, ce sont 13 pour cent d’économies qui ont été faites dès la première année, détaille Caroline Jolly, directeur RSE du groupe Eram. Notre objectif est de réaliser 25 pour cent d’économies d’énergie d’ici 2017 et de continuer à mener d’autres audits sociaux et environnementaux ».

Place aussi à l’éco-conception, à l’ennoblissement des déchets, à un retour à une production plus locale et pourquoi pas louer ses vêtements, acheter seconde main, acheter moins mais mieux… Les initiatives pour repenser la mode se multiplient.

« Avec l'effondrement du Rana Plaza, les consommateurs ont désormais davantage conscience des conditions de fabrication de la mode, il faut continuer à les informer, nous en sommes au démarrage », conclue Isabelle Quéhé.

Mercredi 8 décembre au soir, à l’Hôtel de Noirmoutier à Paris, les signataires de la charte « Changer la mode pour changer le climat » se sont engagés notamment à « concevoir autant que possible des vêtements faits pour durer et pour renaître » et « utiliser au maximum des matières premières locales faiblement consommatrices d'eau et de pesticides ». Ils promettent de « privilégier par exemple le transport fluvial et la fabrication locale », d' « informer le consommateur sur les méthodes d'entretien de ses vêtements et textiles de maison » et d'« oeuvrer au développement des filières de recyclage ».

Photos : Collection L’Herbe Rouge hiver 2015 - Charte « Changer la mode pour le climat » - Ségolène Royal s’engage aux côtés d’Universal Love.

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