La Fashion Week s'ouvre à Londres sous le nuage du Brexit
loading...
Londres - Succédant à New York, la Fashion Week de Londres consacrée aux collections printemps-été 2020 débute vendredi, à 48 jours de la date prévue du Brexit, un divorce auquel l'industrie de la mode britannique est farouchement opposée.
Selon une enquête du cabinet-conseils Fashion Roundtable, 96 pour cent des professionnels du secteur au Royaume-Uni ont voté pour rester dans le giron européen lors du référendum de juin 2016, notamment par crainte de formalités douanières accentuées et de règles durcies en matière de circulation des personnes. Et depuis, leurs craintes n'ont pas été apaisées, bien au contraire.
Le British Fashion Council (BFC), qui représente cette industrie, plaide pour que « soit évitée » une sortie sans accord de l'Union européenne, le 31 octobre, scénario ouvertement envisagé par le Premier ministre conservateur Boris Johnson.
Si le pays devait passer le 1er novembre aux règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), il en coûterait à l'industrie de la mode entre 850 et 900 millions de livres sterling (entre 950 millions et 1 milliard d'euros), selon une étude de l'Association britannique pour la mode et le textile datant de 2018.
L'industrie de la mode britannique rapporte 32 milliards de livres (35 milliards d'euros) à l'économie du pays et emploie près de 900 000 personnes.
« C'est presque autant que le secteur financier », a fait remarquer le BFC dans un communiqué début septembre, exhortant le gouvernement à chercher un accord avec l'UE « qui garantisse une croissance saine et constante de l'industrie de la mode ».
Molly Goddard, Victoria Beckham et Burberry
Dans ce contexte plutôt sombre, Molly Goddard devrait mettre un peu de fantaisie samedi. Cette Londonienne diplômée de la prestigieuse école Central Saint Martins a fait parler d'elle en créant la vaporeuse robe rose bonbon portée par la tueuse Villanelle dans la série télévisée américano-britannique « Killing Eve ».
Parmi les autres défilés vedettes, celui de Victoria Beckham, l'ex-Spice Girl reconvertie styliste. L'an dernier, la star habituée des podiums new-yorkais avait présenté pour la première fois à Londres ses créations à l'occasion des dix ans de sa marque. Cette année, elle lance une ligne de produits de beauté.
Le défilé du poids lourd de la mode britannique Burberry sera un autre point fort de la Fashion Week lundi. Aux manettes, Riccardo Tisci, ex-Givenchy, connu pour célébrer la diversité.
Pour les nouvelles pousses, on guettera dès vendredi le défilé des jeunes pousses de l'incubateur de talents Fashion East et ceux, lundi, de l'Anglais Richard Quinn, maître de la couleur et des imprimés, et de l'Irlandais Richard Malone, qui trouve l'inspiration dans la sculpture et prône une mode durable.
Ouvert (un peu) au public
Nouveauté cette année: en raison d'un engouement populaire grandissant, la Fashion Week de Londres a décidé de s'ouvrir au public lors d'une sorte de Fashion Week parallèle. A partir de 135 livres (150 euros), les fashionistas peuvent acheter un ticket permettant d'assister aux défilés d'Alexa Chung, célèbre « It-girl » (mannequin, chroniqueuse, présentatrice télé, Instagrammeuse...), de House of Holland, du styliste anglais Henry Holland, et de participer à des rencontres-débats avec des membres de l'industrie.
Un pas vers le grand public alors que les Fashion Weeks ne sont depuis longtemps plus réservés aux professionnels, avec l'immixtion d'« influençeurs » publiant des photos des défilés sur les réseaux sociaux.
Tout le monde n'est toutefois pas fan de cette semaine de la mode organisée jusqu'à mardi. Le mouvement écologiste Extinction Rebellion veut même y « mettre fin » et prévoit des actions de désobéissance civile dénonçant l'impact environnemental d'« une des industries les plus polluantes du monde ».
Cette mobilisation doit culminer mardi avec une « procession funéraire » dénonçant les morts liées au changement climatique qui démarrera devant le lieu de principal de la Fashion Week dans le centre de Londres.
Pressée de faire mieux, l'industrie de la mode se réinvente, avec des stylistes comme le duo VIN+OMI qui présentera mardi une collection incluant des pièces textiles conçues avec du plastique recyclé et même avec des orties récoltées dans le jardin du prince Charles.
Le BFC tente elle de mettre en valeur les bonnes pratiques du secteur en matière de développement durable et d'éthique avec une exposition qui leur est consacrée.(AFP)
Image : Richard Malone AW19