Vêtements de sport ou du quotidien: l'offre reste rare pour les porteurs de handicaps
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Paris - Pantalon qui s'ouvre le long de la jambe, tshirt à scratchs ou boutons aimantés: les enseignes grand public proposent encore très peu de vêtements adaptés aux personnes porteuses de handicaps physiques, que ce soit pour faire du sport ou pour le quotidien.
Lundi, Zalando, géant du e-commerce, a lancé une collection "adaptée" de 14 vêtements de sport "fonctionnels et abordables", vendus entre 20 et 40 euros.
Un jogging dont les jambes se dézippent entièrement pour faciliter l'enfilage; un tshirt à l'encolure élargie par des scratchs; des grandes boucles de fermeture-éclair pour une meilleure prise en main, ou encore des aimants à la place des boutons: "trouver des vêtements adaptés et à la mode reste un défi pour les personnes handicapées", met en avant la plateforme européenne multimarques aux 50 millions de clients.
En 2022, Zalando avait dévoilé une première collection de vêtements du quotidien destinées aux personnes porteuses de handicaps, via ses marques propres. Et le site a aussi proposé à la vente deux des rares grandes marques à avoir développé des articles spécifiques, Tommy Hilfiger et Nike.
Mais les collections répondant aux besoins particuliers de porteurs de prothèses ou de personnes en fauteuil roulant restent encore très marginales de la part de l'industrie du textile. En France, les grandes enseignes qui se sont lancées se comptent sur les doigts d'une main.
"Développer une collection inclusive prend du temps, et il faut accepter d'investir dans une collection qui n'a pas pour premier but un but commercial", estime Laura Toledano, directrice général France, Royaume-Uni et Irlande de Zalando.
"C'est une niche, ça ne rapporte pas d'argent", renchérit auprès de l'AFP Virginie Sainte-Rose, directrice du partenariat Decathlon-Paris 2024, pour laquelle "une enseigne multisport se doit d'être accessible à tous et toutes".
Decathlon propose cinquante références de vêtements, sous-vêtements et équipements de sport pour hommes, femmes et enfants "à mobilité réduite", conçus avec des athlètes paralympiques et notamment un ancien joueur de basket-fauteuil italien, Jacopo Geninazzi, ingénieur et salarié de l'équipementier en Italie.
Les Jeux paralympiques, un déclic?
Du côté des vêtements du quotidien, l'enseigne pour hommes Jules propose "une capsule pour s'habiller facilement", conçue avec l'association APF France Handicap, avec par exemple un costume dont l'arrière du pantalon est "large et profond pour un confort optimum assis" dans un fauteuil roulant.
Kiabi développe aussi depuis 2017 une collection spécifique et indique à l'AFP totaliser cette année 268 "références coloris" pour adultes et enfants, avec des vêtements comportant "des astuces pour favoriser l'autonomie sans faire de concession sur le style, la désirabilité du produit, et à des prix accessibles".
Mais globalement, "les marques ont du mal à s'engager, parce qu'il y des coûts de recherche, que c'est pas sexy, qu'il y a un problème d'image: on l'a bien vu avec le film d'Artus, +Un p'tit truc en plus+, où les acteurs (en situation de handicap, NDLR) ont eu beaucoup de mal à trouver une maison de couture qui voulait les habiller" pour le festival de Cannes, déplore Philippe Berranger, directeur du plaidoyer de l'Association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (LADAPT).
"Les personnes en situation de handicap c'est la cinquième roue du carrosse. Par exemple, trouver un vêtement de pluie adaptée à une personne ainsi qu'à son fauteuil, c'est une galère, et on ne voit pas trop de marques se précipiter sur le sujet... dans le commerce, ça devrait faire partie des obligations au moins éthiques" de proposer des collections spécifiques, complète Jean-Louis Garcia, président de l'Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh).
Les deux responsables associatifs espèrent un déclic lors des Jeux paralympiques de Paris: "on va voir de grands champions en situation en handicap, mais à côté il y a aussi plein de sportifs" avec un handicap "qui veulent faire du sport plaisir et ont besoin d'équipements comme les autres", souligne Jean-Louis Garcia.
Pour Philippe Berranger, "on manque d'égéries, si demain on avait une star du paralympisme français vraiment visible, forcément il y aurait des marques de chaussures, de vêtements qui iraient vers elle".
En 2022, Lacoste avait lancé une collection avec le nageur handisport Théo Curin, amputé des quatre membres.(AFP)