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Hélène Viot Poirier, 45 ans, hérite d’une situation compliquée chez Chevignon

By Herve Dewintre

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Chevignon est l’une des plus belles success-story de l’habillement des années 80. Fondée par Guy Azoulay, cette marque de pret à porter française, appréciée pour ses blousons d’aviateurs en cuirs vieillis, a connu durant les premières années de son existence un rythme de croissance admirable: de l’ordre de 20 à 30 pour cent par an. Cet état de grâce ralentit de manière assez franche au début des années 90, date à laquelle le nombre de point de ventes diminua petit à petit. Le fondateur de la griffe se mit alors à rechercher des partenaires, nouant des contacts avec Benetton, André, des groupes japonais. Sans réel succès. La marque fut certes rachetée par Naf Naf des frères Pariente en 1995 mais Chevignon ne retrouva jamais, au cours des décennies suivantes, le lustre et la vogue de ses débuts. En somme, une histoire assez classique, une trajectoire relativement courante pour les marques du “Sentier”.

En 2007, le groupe français Vivarte (André, La Halle aux chaussures, Kookaï, Caroll) lui même, à cette époque, propriété du fond d’investissement PAI Partners, racheta le groupe Naf Naf et fit donc l’acquisition par la même occasion de Chevignon. La marque fut peu à peu réintroduit sur ses marches historiques et entama des collaborations avec des personnalités en vue, comme Jacques Shu et Milan Vukmirovic, ainsi que des co-branding plutôt réussis avec le maroquinier Léon Flam et le cordonnier Pataugas. La “théorie du changement” chère à Georges Plassat, patron de Vivarte durant ces années là, fut adoptée et la marque fut repensée à tous les niveaux, de l’approvisionnement au styliste chapeauté par Ludovic Alban, un ancien de chez Hermes et Carven: approvisionnement rapatrié en Europe et dans le bassin méditerranéen, doudoune confectionnée dans les ateliers landais de Pyrenexw, best-sellers réédités, lignes restructurées, avec une tendance à la montée en gamme. Une stratégie payante qui permit à la marque de redevenir bénéficiaire dès 2012.

Entretemps malheureusement, Vivarte essuya une crise majeure. Quatre fonds d’investissements - Oaktree, Alcentra, Babson et Goldentree - entrèrent alors en jeu et effacèrent deux milliards d’euros de dette. Une somme conséquente mais insuffisante comme on le verra par la suite. Leurs conditions furent terribles mais logiques: vendre “à la découpe” l’ensemble des marques du groupe pour faire entrer du cash. La vente de Chevignon est désormais évoquée.

Une experte de la mise en oeuvre des stratégies digitales

Aujourd’hui, Chevignon réalise un chiffre d’affaires de 35 millions d’euros et repose sur un réseau de plus de 235 points de vente. La crise reste forte chez Vivarte qui procède à des nombreux plans sociaux, notamment chez La Halle aux Chaussures. Le groupe a récemment vendu Pataugas à un trio d’entrepreneur. En janvier dernier, la mise en vente d’André et de Naf Naf a été annoncée. Chevignon, in extremis, reste pour l’instant dans le groupe même si sa mise en vente avait été annoncée pour le début de l’été.

Hélène Viot-Poirier, hérite donc d’une marque au passé superbe mais à la situation actuelle compliquée. A 45 ans, cette diplomée de HEC devient la nouvelle directrice générale de la marque, succédant ainsi à Fabio Luxi. Hélène Viot-Poirier connait bien les rouages de Vivarte qu’elle a rejoint en 2016 en qualité de directrice internet et marketing : elle a accompagné, durant deux ans, la définition et la mise en oeuvre des stratégies digitales de diverses entreprises. Diplômée de HEC, elle débuta sa carrière en qualité de manager marketing au sein de start-up spécialisées dans les télécommunications, à savoir Club Internet entre 1996 et 1997 puis Kertel-Kering entre 1997 et 2001. Elle intégra Orange en 2001, un groupe dans lequel elle évoluera pendant 12 ans, occupant des fonctions de direction liées aux stratégies et politiques digitales.

Sa bonne connaissance du digital justifie très certainement la confiance que lui accorde le nouveau patron de Vivarte. Patrick Puy, connu pour etre un « manager de transition », un PDG dont la spécialité est d’accompagner les groupes en difficulté. Conformément à la logique des investisseurs qui consiste à « faire tourner le portefeuille », Patrick Puy sait parfaitement qu’une entreprise, pour ces fonds, est achetée pour une durée comprise entre cinq et sept ans.

La mise en œuvre d’une stratégie cross-canal attrayante pour Chevignon pourrait permettre à la nouvelle DG de reconquérir les clients et même de développer la marque à l’Internationale. En effet, jusqu'à maintenant, les enseignes de Vivarte ne réalisent que 4 pour cent de leur chiffre d’affaires en ligne. De quoi satisfaire les quatre fonds d’investissement propriétaire de Vivarte, qui, ils le savent, vont devoir repasser à la caisse pour éponger les dettes de Vivarte et qui attendent aujourd’hui, non sans impatience, de pouvoir revendre cette marque iconique dès qu’elle brillera de nouveau de tout ses apprêts.

Credit photo: Chevignon,dr

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