Les collaborations entre marques de mode sont-elles vraiment rentables ?
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Les collaborations. Ces collections issues d'un partenariat entre deux marques distinctes sont-elles vraiment une bonne idée ? FashionUntied a creusé la question.
À première vue, les collaborations dans le domaine de la mode semblent être un moyen séduisant de générer de nouvelles affaires et des performances de vente globales. Que la collaboration soit relativement évidente, comme Gucci et Adidas, ou plus surprenante, comme Crocs et Balenciaga ou Alexander McQueen et Target, elles génèrent de l'intérêt et de l'engagement, notamment en termes de nouveaux clients. Il est par ailleurs assez clair qu'en ce qui concerne les collaborations entre griffes de luxe et marques de masse market, l'objectif est de se rapprocher du client idéal.
Mais si l’on creuse un peu, l'efficacité de ces collaborations, et leur capacité à véritablement attirer de nouveaux clients et à augmenter les ventes, peut être remise en doute, en particulier pour les marques de luxe. Ce n'est pas comme si le client typique de Target s'était soudainement rendu à la boutique McQueen, payant des milliers de dollars de plus pour un article qui en coûtait moins de 100 chez Target. En fait, pour de nombreuses marques, ces collaborations très médiatisées placent souvent la barre très haut et ne peuvent pas être recréées facilement ou systématiquement. Elles amènent les marques de luxe à adopter une position de suiveur, toujours à la recherche de la prochaine collaboration, de la nouvelle tendance. Alors que, traditionnellement, les griffes de luxe étaient plutôt celles qui menaient la danse. En fin de compte, ces collaborations sont souvent le signe que la marque ne se porte pas très bien, et que sans l’appui d'un autre label plus accessible, elle ne pourrait pas atteindre ses objectifs.
Prenons l'exemple de la récente collaboration de Gucci avec Adidas. Bien que ce partenariat soit plus évident que d’autres, il renforce le fait que la seule différence entre une sneaker Adidas à 75 dollars – qui a déjà une influence culturelle – et la version Gucci, est le logo, les couleurs de la marque, les fioritures et un prix de 800 dollars supplémentaire. Malgré tous les discours sur les valeurs d'« authenticité » et de « transparence », il semble ici s’agir du contraire car la collaboration démontre que le luxe repose bien plus sur le concept de « la poudre aux yeux » que sur une véritable différence de qualité. En fin de compte, ce que cette collaboration nous apprend est que les baskets Adidas à 75 dollars demeurent finalement une assez bonne affaire.
L’exemple simplifie peut-être un peu les choses, mais en observant le marché du luxe dans sa globalité, on remarque aisément un changement vers le luxe de masse, aussi appelé « fast luxury ». Cette évolution pousse des marques comme Chanel à creuser plus profondément dans leur propre ADN plutôt que de se lancer dans la recherche de collaborations.
Un autre élément important à prendre en compte lorsqu'il s'agit de ce type de collaboration est que la plupart de ces marques de luxe sont désormais détenues et exploitées par les groupes LVMH ou Kering, qui, financièrement, se portent bien. Cela leur permet donc de jouer le jeu de la collaboration sans nécessairement avoir à générer un réel profit pour la marque elle-même. Davantage qu’un retour sur investissement, le but est ici marketing et vise à garder ces marques pertinentes. Après tout, la mode est un cycle, et l'on attend de ces marques qu’elles aient à nouveau leur chance d'exercer une influence culturelle. Car gardons à l'esprit qu'il est en effet plus facile de ressusciter une marque de luxe patrimoniale que d'en créer une nouvelle : demandez à Rihanna.
Cet article a initialement été publié sur FashionUnited.com. Il a été traduit et édité en français par Julia Garel.