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150 ans après sa fondation, Chargeurs flambe de nouveau

By Herve Dewintre

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Personne n’aurait pu imaginer que la crise du Covid-19 puisse redonner tout son éclat à une entreprise française vénérable. Et pourtant, alors que les chiffres alarmants s’accumulent dans l’industrie du textile, les multiples exploits prodigués depuis un mois par cette société fondée en 1872 sous le nom de Compagnie de Navigation des Chargeurs Réunis prouve la pertinence de son modèle économique basé sur l’audacieuse stratégie de son jeune dirigeant Michaël Fribourg.

Chargeurs revient de loin. Cette multinationale de 2000 collaborateurs situés sur cinq continents au service d’une base de clientèle de plus de 90 pays avait l’allure d’une belle endormie lorsqu’en 2015, Colombus Holding SAS, société d’investissement à long terme dirigé par Michael Fribourg, rachète aux côtés d’investisseurs institutionnels (BNP Paribas Développement, CM-CIC Investissement, Effi-Invest II, Harwanne - groupe Covea), la participation de Jerome Seydoux et d’Edouard Malone au capital de ce groupe spécialisé dans la laine peignée et la chimie.

Jerome Seydoux avait racheté le groupe en 1980 pour le transformer totalement. Les activités maritimes de la compagnie avait fait place à de nouveaux champs de développements, dans la communication notamment tandis que l’activité textile était renforcée. L’ensemble composait un groupe d’une grande diversité d’activités, évoluant au fil des années. En prenant les commandes du groupe, Michael Fribourg – Enarque, ancien inspecteur des finances - ne propose pas un énième repositionnement des activités basée sur les théories managériales du moment mais une vision à long terme.

Cette vision à long terme se fonde sur le développement des activités de niche. Pas de regroupement mais au contraire, une myriade de petites entreprises ultraspécialisées qui savent livrer avec une rapidité et une minutie confondante des solutions sur mesure au client. Une stratégie à contre-courant des pratiques habituelles (ici on ne regroupe pas pour optimiser les coûts) conciliant culture de la modestie et obsession de l’innovation, afin de capter les nouvelles tendances loin des schémas préconçus.

La transformation est totale. Dès son arrivée, le jeune patron ajoute sept usines au groupe, embauche plusieurs centaines de commerciaux évoluant aux quatre coins du globe, met la main sur une dizaine de sociétés spécialisées. Certes, les quatre domaines dans lesquels sont spécialisés Chargeurs sont toujours les protections temporaires de surface (qui permettant de livrer sans griffure les commandes), l’entoilage (destiné à l’industrie du prêt à porter), la laine (fournie aux maisons de luxe) et l’aménagement d’espaces sous la forme de films textiles ou plastiques qui peuvent s’imprimer pour créer des décors. Mais ces quatre domaines de prédilection s’articulent autour de 74 autres métiers qui constituent pour la compagnie un vaste panel de savoir-faire en phase avec les demandes du marché.

« La technologie constituera la principale source de croissance de Chargeurs »

Cette agilité se matérialise début mars aux toutes premieres heures de la pandémie. Parce qu’il sait qu’il peut compter sur une totale mobilisation des talents du groupe, Michael Fribourg, le week-end du 22 mars, sonne le branle-bas de combat et réoriente les capacités de production de Chargeurs de façon à pouvoir fournir, en un temps records et en quantités industrielles, des masques de protection et du gel hydroalcoolique à destination des professionnels de santé et des professions exposées. Les cibles de productions sont claires, crédibles.

Le reste fait désormais quasiment partie de l’Histoire. Les grands donneurs d’ordre publics et privés, partout dans le monde, font immédiatement confiance en la capacité du groupe à faire face à l’urgence et à produire en masse, avec fiabilité, des produits critiques. Les résultats de cette stratégie sont stupéfiants : le groupe est aussitôt capable de livrer 5 tonnes par semaine de gel hydroalcoolique conçu sur le site Novacel en Normandie, un million de masques réalisés sur le site de la Lainière de Picardie est fourni chaque semaine. Au fil des jours, les exploits se multiplient. Cette semaine, le groupe produira entre 7 et 8 millions de masques.

Aujourd’hui même, Michael Fribourg a annoncé sur l’antenne de BFMTV que le groupe, sous la marque Lainière Santé, sera capable de produire plus de 15 millions de « masques grand-public réutilisables » par semaine à partir du 15 mai. Leur capacité de filtration sera de 70 pour cent. Ils seront vendus à un prix hors taxe inférieur à 5 euros, seront réutilisables 10 ou 20 fois et seront également disponibles dans les bureaux de tabacs, le groupe ayant eu la bonne idée de conclure un accord avec les buralistes. La bourse bien évidemment, consacre ces exploits : le titre a été multiplié par près de trois en 6 séances. Le groupe prévoit de dépasser l’année prochaine le milliard d’euros de chiffre d’affaire avec un taux de marge opérationnelle supérieur à 10 pour cent.

Crédit photo : chargeurs

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