André, Camaïeu, Naf Naf... Pourquoi le coronavirus heurte la distribution
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Paris - Emmanuel Macron avait assuré mi-mars qu'"aucune entreprise ne sera(it) livrée au risque de faillite" à cause du confinement, mais de nombreuses enseignes de la distribution, déjà fragilisées avant la crise du coronavirus, risquent de payer un lourd tribut économique et social.
Suite de crises
La marque de chaussures André, 600 salariés, a été retenue comme la première entreprise victime du coronavirus. L'enseigne plus que centenaire, rachetée un an et demi plus tôt par Spartoo, a été placée en redressement judiciaire le 1er avril. Le PDG du site de vente en ligne, Boris Saragaglia, a pointé une multiplication des crises: "gilets jaunes", grèves "en pleine période de soldes en janvier" et Covid-19.
Un empilement de chocs que les groupes les plus fragiles n'ont pas supporté. C'est le cas du groupe de vêtements pour enfants et d'articles de puériculture Orchestra-Prémaman, en procédure de sauvegarde depuis septembre 2019. L'entreprise héraultaise, 2.900 salariés dans le monde, a été placée en redressement judiciaire le 29 avril.
Fragilités préexistantes
Outre les mouvements sociaux, la distribution subit la baisse drastique de la consommation de vêtements et de chaussures neufs et la concurrence de l'occasion. Depuis 2008, le marché a perdu 15 pour cent de sa valeur, selon l'Institut français de la Mode, et c'est le "moyen de gamme" qui est le plus touché. Fin mai, c'est le nordiste Camaïeu, 3.900 salariés, 634 magasins en France et un passé déjà émaillé de crises, qui a été placé en redressement judiciaire.
Quelques jours plus tôt, c'était le cas de Naf Naf, 1.170 salariés. Et La Halle, qui pèse 847 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel et emploie près de 5.400 personnes, devrait suivre le mouvement incessamment.
Poids du réseau physique
Logiquement, confinement et fermeture administrative ont avant tout frappé les enseignes "où l'activité repose essentiellement sur le réseau physique (80 à 95 pour cent du CA)", note auprès de l'AFP Céline Choain, spécialiste du secteur mode et distribution au sein du cabinet Kea & Partners.
Cette chute brutale d'activité "souligne la nécessité d'une transformation des modèles": accélération digitale, reconfiguration des réseaux et de la vocation des points de vente, variabilisation des coûts, dans une industrie de coûts fixes (salaires, loyers, commandes,...).
Ces charges pèsent en effet beaucoup moins sur les DNVB (digitale natives) plus agiles que les référents historiques du secteur. "Tout l'enjeu aujourd'hui est de se demander comment définir de nouveaux modèles opérationnels et économiques gagnants, sans être mimétique avec les DNVB dont le modèle n'est pas le même ", estime Céline Choain. Un des "facteurs de résilience", poursuit-elle, c'est la transition numérique. Rémy Baume, le patron de Zadig&Voltaire, dont 15 pour cent de l'activité est faite en ligne, s'est déclaré mercredi sur BFM Business "heureusement surpris de notre progression sur le 'digital', doublée, triplée pendant le confinement".
Pas la fin de l'histoire
Pour les plus touchés par la crise, l'espoir subsiste: le redressement judiciaire ne siffle pas la fin de l'histoire. La justice peut prononcer, au terme d'une période d'observation de 6 à 18 mois, une liquidation si le rétablissement de l'activité apparaît impossible. Mais elle peut aussi décider un plan de redressement d'une durée maximale de 10 ans, ou une cession totale ou partielle de l'activité.
Certaines des enseignes aujourd'hui en difficulté ont ainsi fait l'objet de marques d'intérêt. Naf Naf dispose de deux repreneurs intéressés, le groupe français Beaumanoir et le fabricant turc Sy International. Vivarte, maison-mère de La Halle, dit aussi avoir reçu sept offres de reprise partielle pour La Halle. Mises bout à bout, elles ne porteraient toutefois à ce stade que sur 60 pour cent des salariés, faisant craindre une "catastrophe sociale" aux syndicats.
Des synergies sont aussi possibles dans le secteur de l'ameublement, pas épargné, avec le placement en redressement judiciaire d'Alinéa (2.000 salariés) le 13 mai à Marseille: But nourrit ainsi des "projets d'alliance" avec son concurrent Conforama, qui compte plusieurs milliers de salariés en France.(AFP)
Crédit : Camaïeu Facebook