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Au Bangladesh, le combat des ouvriers du textile pour un salaire digne

By AFP

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Des militants du IndustriALL Bangladesh Council ont organisé un rassemblement de protestation pour exiger une augmentation du salaire minimum pour les travailleurs du textile, à Dhaka, au Bangladesh, le 1er octobre 2023. Credits: STR / Nur Photo / NurPhoto via AFP

Dacca - Pendant dix ans, Naim Pramanik a cousu sans relâche des chemises et des pantalons pour de grandes marques occidentales, mais aujourd'hui cet ouvrier bangladais de 28 ans est sans emploi, licencié après avoir osé manifester pour un salaire équitable.

"Certains vêtements que nous fabriquons sont vendus 100 dollars la pièce aux Etats-Unis et en Europe", explique-t-il en montrant les étiquettes du géant américain de la mode Tommy Hilfiger ou de la marque britannique George.

Mais "nous ne gagnons pas plus de 100 dollars par mois", regrette-t-il.

Le pays de 170 millions d'habitants, le huitième plus peuplé du monde, a été secoué le mois dernier par un conflit social d'une ampleur inédite depuis une dizaine d'années.

Des dizaines de milliers de travailleurs ont affronté la police pour réclamer un salaire mensuel minimum de 23.000 takas (190 euros), contre les 8.300 takas fixés par le gouvernement il y a cinq ans. Au moins cinq personnes ont été tuées.

M. Pramanik s'est joint aux manifestations le mois dernier parce que son salaire mensuel de 75 dollars "nous tuait", dit-il.

"Plus rien à manger"

L'industrie de l'habillement a été le principal moteur de l'impressionnante croissance économique du Bangladesh, qui a dépassé l'Inde voisine en termes de PIB par habitant et est devenu la coqueluche de marques occidentales telles que H&M, Levi's, Uniqlo et Zara.

Mais selon des experts, l'industrie n'a pas réussi à sortir ses quatre millions de travailleurs de la pauvreté.

"Nous sommes descendus dans la rue pour défendre nos revendications légitimes et c'est pour ça que mon usine m'a licencié", s'indigne M. Pramanik.

Un porte-parole de son ancien employeur Wear Mag, a déclaré qu'il avait été licencié pour un "absentéisme de plusieurs jours".

Assis sur le lit de l'habitation de 4,5 m³ semblable à une cellule qu'il partage avec sa femme et son bébé dans la banlieue de la capitale Dacca, où il partage la cuisine et les toilettes avec huit autres familles, l'ouvrier montre un pot de riz presque vide.

"Ce sont les derniers grains qu'il me reste. Une fois que ce sera terminé, je n'aurai plus rien à manger", affirme-t-il. "Je devrai mendier ou emprunter pour me nourrir".

L'ouvrier a reçu une indemnité de départ de 67.000 takas (550 euros) mais "après avoir payé le loyer, mes dettes, il ne me reste plus rien", explique-t-il, inquiet de ne pas pouvoir subvenir aux besoins de son bébé.

"Regardez ma maison, il n'y a rien. Je dors sur un lit cassé", poursuit-il.

M. Pramanik envoyait une grande partie de son salaire à sa famille dans un village de la zone rurale de Sirajganj, dans le nord du pays, que beaucoup ont quitté alors que les emplois agricoles disparaissaient avec la mécanisation de l'agriculture.

Licenciés pour avoir manifesté

Le mois dernier, le gouvernement a augmenté le salaire mensuel minimum de 56%, mais les syndicats ont répondu que cela ne répondait pas à la flambée des prix alimentaires, des loyers et des soins de santé.

Pour le groupe de défense des droits humains, Clean Clothes Campaign, ce salaire permettait tout juste de "joindre les deux bouts".

Les syndicats ont mis fin aux manifestations après une importante répression policière, mais préviennent qu'elles reprendront si les revendications ne sont pas satisfaites d'ici début janvier, quand des élections générales se tiendront au Bangladesh.

Les propriétaires d'ateliers de confection comptent parmi les personnes les plus riches du pays, et plusieurs sont également élus au Parlement.

Selon les syndicats, des centaines de travailleurs ont perdu leur emploi pour avoir participé aux manifestations, comme également Prodip Ray, 38 ans, un dirigeant syndical qui a mené des manifestations dans le district de Mirpur, dans la capitale.

D'après lui, la "culture" de licencier des travailleurs "simplement parce qu'ils ont participé à une manifestation" est répandue.

Akter, une mère célibataire de 28 ans elle aussi licenciée, ayant demandé à n'être identifiée que par son prénom par crainte de représailles, dit ne pas savoir "comment je vais passer le mois" avec moins de quatre dollars d'économies.

"Je ne sais pas comment je vais m'occuper de mon fils", confie-t-elle.(AFP)

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