Balmain peut rebondir malgré le vol inédit avant la Fashion week selon des experts
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Une enquête a été ouverte après le vol samedi de plus de 50 pièces de la prochaine collection de la maison Balmain, à quelques jours de la Fashion Week de Paris, a annoncé lundi le parquet français.
"Le véhicule a été braqué par des individus armés, à la sortie de la zone DHL de l'aéroport de Roissy, qui ont sorti le chauffeur et pris la fuite avec le véhicule", indique une source policière. Le camion a été retrouvé vide à Mitry-Mory (Seine-et-Marne), précise cette source.
"Une dizaine de colis ont été dérobés" et le préjudice est "en cours d'évaluation", selon une autre source proche de l'enquête. Parmi les colis non volés, trois ont été restitués à la maison, a indiqué une source proche du dossier, précisant que le camion transportait d'autres cartons que ceux destinés à Balmain. D'après la même source, trois personnes ont participé au vol.
Interrogée par l'AFP, la griffe, rachetée en 2016 par le fonds d'investissement qatari Mayhoola, s'est contentée de maintenir le défilé à la date prévue : le 27 septembre à 20H00.
Un "plan B"
"Je suppose que la maison a un plan B et c'est bien que le défilé n'ait pas été annulé. Il ne faut pas que ce genre de situation nous empêche d'avancer", estime Blenda Clerjon, directrice pédagogique à l'Institut français de la mode (IFM).
"C'est impossible de ressortir 50 pièces telles que c'était, mais ce ne sera pas de qualité moindre. Balmain a suffisamment de ressources pour trouver comment remplacer des pièces et rester dans le haut de gamme", poursuit-elle. Serge Carreira, maître de conférences à Sciences Po, spécialiste du mode et du luxe, souligne pour sa part que les modèles volés sont des prototypes, "l'aboutissement du processus" créatif et les patrons existants permettraient de refaire les vêtements.
"La maison Balmain a des ateliers, ils ont des sous-traitants, un réseau d'artisans. En mobilisant le maximum de forces, il est possible de réaliser cela", estime-t-il.
À l'échelle d'une collection, 50 pièces représente beaucoup. "C'est énorme, ce sont des heures et des heures de travail", souligne Blenda Clerjon en ajoutant qu'un défilé de prêt-à-porter présente en moyenne 65 looks. "Cela dépend de la nature de la pièce : une robe est égale à un look. Avec des vestes, pantalons, chemises ou mailles, on est sur deux ou trois pièces qui vont faire un look", détaille Serge Carreira. Il est difficile à dire si les pièces volées représentaient "20% ou 80% de la collection". Mais le nombre est "consistant".
Y a-t-il déjà eu des précédents ?
Le vol en bande organisée réalisé pendant le transport de l'aéroport de Roissy au siège de Balmain, à Paris, dévoilé par le styliste star de la maison Olivier Rousteing, est "exceptionnel", estime Serge Carreira.
"Il peut y avoir des colis qui se perdent lorsqu'ils sont envoyés par un sous-traitant" mais le nombre de pièces volées est "impressionnant". En 2011, le créateur américain Marc Jacobs s'était fait voler l'intégralité de sa collection dans un train entre Paris et Londres, mais après le défilé.
Pour développer une collection, il faut entre trois mois, pour les grandes maisons avec des rythmes rapides et de nombreuses équipes, et six à sept mois pour les plus petites maisons, selon Serge Carreira.
"C'est un processus créatif évolutif, presque au fil de l'eau. Cela peut aller très vite si un modèle correspond immédiatement à ce que le créateur recherche. Mais il n'est pas rare qu'on décide d'apporter des modifications", en rajoutant les manches, changeant le tissu, allongeant ou raccourcissant..., explique-t-il.
Quel intérêt présentent ces pièces pour les voleurs ?
Pour Blenda Clerjon, "ce sont forcément des vêtements magnifiques, si on connaît les collections Balmain, il y a un savoir-faire sur les broderies, sur l'embellissement de la pièce". Mais ce n'est pas considéré comme une pièce Balmain "si cela n'a pas été présenté pendant la Fashion Week. Cela n'a pas de valeur", affirme-t-elle.
"Quand il s'agit de prototypes qui ont défilé et qui deviennent des pièces iconiques, elles ont une valeur extrêmement importante. Mais là, j'ai du mal à imaginer quelqu'un qui va chercher à faire énormément de promotion aux modèles volés", renchérit Serge Carreira.
Si pour les bijoux volés, il y a la valeur de la pierre sur le marché noir, "la valorisation d'une broderie, c'est plus compliqué", ajoute-t-il. "Peut-être s'imaginaient-ils voler 50 paires de baskets facilement vendables sur les réseaux ?"
Est-il normal que les pièces soient arrivées par avion ?
"Cela ne me choque pas. Cela peut arriver de l'Europe comme cela peut arriver du Sud de la France", souligne Blenda Clerjon. "Les pièces voyagent, elles bougent, on ne peut pas tout fabriquer à l'atelier à Paris. Parfois, pour gagner du temps, on le fait fabriquer en Europe".
Mêlant hip-hop et castings sous le signe de la diversité Olivier Rousteing a bousculé les codes et multiplié les démarches pour rendre l'univers du luxe compréhensible pour les jeunes et "démocratiser" la mode, devenant lui-même une star, fréquentant les célébrités et le tapis rouge du Festival de Cannes. (AFP)
Cette dépêche de l'AFP a été éditée par FashionUnited.