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François Pinault aura son musée à Paris

By Herve Dewintre

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Au fond, les grands seigneurs français ont toujours aimé couronner leur règne par l’édification de bâtiments grandioses qui attesteraient leur puissance passée aux générations futures. Il est vrai que, parfois, ils se contentaient « modestement » d’un musée ou d’une fondation nichées au cœur d’ un lieu existant. Louis XIV nous a offert Versailles, François Mitterand la pyramide du Louvre, Jacques Chirac le musée Branly. Les grands seigneurs d’aujourd’hui étant les capitaines d’industrie, il était donc logique qu’aux premières heures de ce nouveau siècle, Bernard Arnault et François Pinault nous gratifient respectivement de leur fondation d’art à quelques mois d’intervalle.

C’était une rumeur qui courrait depuis plusieurs mois : François Pinault, fondateur du groupe de luxe Kering et très célèbre collectionneur d’art, voulait installer une fondation dédiée à l’art - une fondation à son nom - au cœur de Paris. En 2005, un projet de musée extraordinaire (situé sur l'ancien site des usines Renault de l'île Seguin) avait été annulé. Diverses lenteurs liées à de nombreux intérêts contradictoires étaient en cause. Dépité, M.Pinault s’était alors tourné vers Venise, ville plus accueillante, où il s’était offert deux lieux muséaux et un Teatrino sur la lagune.

Le magnat breton avait-il perdu l’espoir de voir un jour se dresser une fondation à son nom dans son pays natal ? Tout en sachant que la fondation Louis Vuitton qui s’élance désormais aux abords du Bois de Boulogne, est un succès incontestable ? Non, bien évidemment. Le magnat breton n’avait pas perdu espoir : il était même en négociations directes avec la Ville de Paris dans le but de trouver un édifice digne de ce nom, de préférence au cœur de la Capitale et non à l’orée d’un bois. On avait un temps parlé de l’espace Pierre Cardin mais c’est désormais officiel, un édifice beaucoup plus prestigieux (architecturalement parlant) abritera cette fondation : la Bourse de commerce de Paris. Un bâtiment superbe, datant du XVIIIe siècle, fondamentalement liée à l’histoire de Paris.

Le Bâtiment jouxte la rue du Louvre. Le seul hic de cette rue est la proximité navrante avec le forum des halles, très (trop ?) populaire. Voisinage qui a un peu terni au fil des années le prestige du lieu. Mais le projet de rénovation de la poste du Louvre - qui va bientôt devenir un îlot urbain à «usage mixte» sous la houlette de l'architecte Dominique Perrault - devrait rendre tout son lustre au quartier. Ironie ou hasard inévitable ? Ce quartier subitement magnifié par la Fondation Pinault n’est pas très éloigné du chantier de rénovation de la Samaritaine qui incarnera de son coté, l’installation définitive du luxe, vu par LVMH, au cœur de la Ville Lumière.

Un dossier suivi de près par la mairie de Paris

Au cours de son existence, la bourse de commerce de Paris changea plusieurs fois de propriétaire : tantôt elle appartint à la ville de Paris, tantôt à la chambre de commerce. Et vice et versa suivant les fluctuations changeantes des prédilections diverses. A l’origine, il s’agissait d’une halle aux blés, construite sur un terrain particulièrement propice à l’acheminement des grains, à cause de sa proximité avec la Seine. Auparavant, sur ce même terrain, s’était jouée une partie de la destinée des rois et des reines de France, de Saint Louis à Catherine de Médicis, en passant par Philippe Auguste.

Ironie de l’histoire, la ville de Paris transféra la propriété du bâtiment à la Chambre de commerce, pour un franc symbolique, en 1949. La quasi-totalité du monument est aujourd'hui occupée par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris, qui le gère et y propose, notamment, des services à la création d'entreprises. Concrètement, la Ville de Paris est donc en course pour racheter ce même bâtiment qu’elle a vendu un franc symbolique il y a plusieurs décennies

En effet, pour pouvoir profiter de ce somptueux édifice, François Pinault devait en faire l’acquisition auprès de la mairie de Paris, et non de la chambre de commerce. C’est le journal les Echos (propriété du groupe LVMH, groupe concurrent de Kering) qui avait vendu la mèche il y a quelques jours. « La Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris-Ile-de-France serait proche de donner son accord pour la vente de la Bourse de commerce à la Ville de Paris qui la rétrocéderait à François Pinault via un contrat à durée indéterminée sous la forme d’un bail emphytéotique». Une signature de vente à la Ville de Paris aurait lieu au plus tard fin juillet, précisait les Echos.

Depuis ces révélations, les événements se sont accélérés, la situation s’est débloquée. Et de fil en aiguille, la mairie de Paris a organisé une conférence de presse mercredi matin, en présence de tous les intéressés, pour annoncer la glorieuse nouvelle : la Bourse de commerce de Paris, abritera bel et bien la collection Pinault. « «C’est une très belle journée !» se réjouissait Anne Hidalgo, maire de Paris en ouverture de la conférence de presse avant d’ajouter avec des trémolos dans la voix : « «C’est une chance inouïe d’accueillir à Paris la collection de monsieur Pinault !»

François Pinault promet une nouvelle vie à la Bourse de commerce pour fin 2018. Martin Béthenod, qui dirige les installations vénitiennes, sera aussi le directeur du site de Paris. Tadao Andō sera l’architecte du projet aux cotés de Lucie Niney, de Thibault Marca et d’un architecte en chef des monuments historiques, Pierre-Antoine Gatier. La fondation aura un bail sur cinquante ans. Elle assurera le fonctionnement, les dépenses du musée et les factures des travaux. De son coté, la mairie de Paris donnera 21 millions d’euros à la Chambre du commerce, plus quelques nouveaux bureaux au cœur de batiments du Xe arrondissement.

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