Loi anti-surproduction : 65 ONG européennes pressent Bruxelles de soutenir l'ambition française
Soixante-cinq organisations de la société civile, françaises et européennes, se sont unies pour exhorter la Commission européenne à soutenir sans réserve le projet de loi français visant à freiner les pratiques commerciales les plus dommageables du secteur de la mode.
Dans une lettre ouverte rendue publique ce mardi, ces groupes alertent sur l'accélération des ventes de vêtements en Europe, qui inonde les marchés d'articles à faible ou aucune valeur de revente. Cet afflux massif sature les collecteurs et trieurs de textiles, augmentant inéluctablement les taux de déchets destinés à l'incinération ou à l'enfouissement.
Sanctionner la surproduction via l'éco-modulation
Les organisations s'appuient sur la Directive-cadre révisée sur les déchets (DCD), qui exige des États membres d'établir des régimes de Responsabilité Élargie du Producteur (REP) pour les textiles. La directive autorise notamment la modulation des contributions financières basées sur le volume mis sur le marché et les critères d'écoconception, relaye Fibre2fashion ce matin.
La proposition de loi française, déjà adoptée par le Sénat en juin 2025, entend renforcer ces dispositions REP en pénalisant les pratiques commerciales menant à la surproduction. Elle prévoit notamment un système de bonus-malus avec des pénalités pouvant aller jusqu'à 10 euros par article en 2030 pour les acteurs de la mode ultra-éphémère.
L'objectif de cette mobilisation est de faire pression sur la Commission européenne, qui a émis des doutes sur la compatibilité de ce texte national avec le droit de l'Union européenne (UE), notamment sur la question de la libre circulation des marchandises.
Le « pollueur-payeur » au cœur de la stratégie
Emily Macintosh, responsable des politiques textiles au Bureau européen de l'environnement (EEB), a déclaré : « La Commission doit concrétiser son engagement à freiner les impacts néfastes de la mode. Les systèmes REP doivent représenter de véritables incitations pour les marques à changer leur mode de fonctionnement. Nous devons agir maintenant pour endiguer le flux incessant d'articles sans valeur inondant le marché mondial du textile de seconde main. »
Pour les signataires, la proposition française est le moyen le plus efficace d'appliquer le principe du « pollueur-payeur » aux volumes de production.
« La proposition française est une opportunité unique de s'attaquer véritablement au modèle néfaste de la surproduction dans l'industrie de l'habillement, » a ajouté Pierre Condamine, militant pour la lutte contre la surproduction chez Les Amis de la Terre France. « La France et l'UE doivent jouer un rôle d'exemple en garantissant l'adoption rapide de la législation dans sa version la plus ambitieuse. »
L'issue des discussions en cours à Bruxelles sera déterminante pour l'avenir de la législation française et pour la capacité des États membres à réguler plus fermement les acteurs de l'ultra fast fashion sur leur territoire.
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