Milan Fashion Week : Le luxe en question, la mode en réponse
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Pendant six jours, Milan scintille au rythme de la Fashion Week, mais en coulisses, derrière l’éclat des podiums, l’industrie du luxe vacille face à une conjoncture difficile.
Dès ce mardi, les podiums milanais accueilleront les collections Automne/Hiver 2025-2026, dans un contexte où le secteur du luxe peine à retrouver son éclat. Comme le rapporte l’AFP, la mode italienne fait face à un recul de 5 % de ses ventes en 2024, un chiffre révélateur d’un ralentissement mondial marqué par l’affaiblissement du marché chinois et une baisse de l’appétit pour les produits haut de gamme.
Gucci, symbole d’une crise du luxe ?
Autrefois star incontestée de la Fashion Week de Milan, Gucci ouvre les festivités cette année sous une ombre pesante. Le géant du luxe, filiale du groupe français Kering, a enregistré une chute vertigineuse de 23 % de ses ventes, un revers qui met en lumière les difficultés d’un marché en plein changement de paradigmes. Ce contexte tendu a mené à un remaniement interne : Sabato de Sarno, directeur artistique de Gucci depuis seulement deux ans, a quitté son poste à quelques semaines à peine du show. François-Henri Pinault, PDG de Kering, tente de rassurer les investisseurs en affirmant que des mesures sont prises pour « renforcer la désirabilité des marques à long terme. », rapporte l’AFP.
Kering, dont Gucci représente près de la moitié du chiffre d’affaires, a vu son bénéfice net plonger de 62 % en 2024, atteignant 1,13 milliard d’euros. Un coup dur pour le groupe, alors que certaines de ses autres marques, comme Bottega Veneta, affichent des performances plus encourageantes.
Un luxe sous tension à l’échelle mondiale
Comme l’explique le cabinet Bain & Company, seuls un tiers des acteurs du luxe ont connu une croissance en 2024. L’incertitude économique et la hausse des prix pratiquée par les marques ont incité les consommateurs à réduire leurs achats de biens non essentiels.
L’Italie n’échappe pas à cette tendance : selon la Chambre de la Mode Italienne, le secteur devrait générer moins de 96 milliards d’euros en 2024, soit une baisse de 5,3 %. Pire encore, l’industrie du cuir et de la chaussure, essentielle au savoir-faire italien, prévoit une chute de 8,1 %, avec des milliers de travailleurs en chômage partiel, notamment en Toscane.
Dans ce contexte, les pressions sur le gouvernement se multiplient. La Chambre de la Mode Italienne plaide pour des politiques de soutien et des investissements dans l’innovation et la chaîne d’approvisionnement. Si 110 millions d’euros ont été alloués à la mode ces deux dernières années, certaines usines continuent de fermer, à l’image du site de production de Bally près de Florence, où 55 emplois sont menacés.
Un souffle créatif malgré tout
Malgré les difficultés économiques, Milan conserve son prestige et son attractivité. Cette édition 2025 célèbre plusieurs anniversaires majeurs : Fendi fête ses 100 ans, DSquared souffle ses 30 bougies et Kway célèbre six décennies d’existence. Prada, Giorgio Armani, Versace, Max Mara, Ferragamo et Dolce & Gabbana seront aussi de la partie, tandis que Bottega Veneta a reporté son premier défilé sous la direction de Louise Trotter à septembre.
Dans un marché en quête de repères, les maisons de luxe doivent désormais conjuguer créativité et pragmatisme pour séduire une clientèle de plus en plus exigeante. Si la mode continue de défiler, le défi du luxe, lui, ne fait que commencer.