L’aide à la jeune création passe aussi par les régions : focus
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Les jeunes créateurs sont la relève de demain. Pourtant, ils sont en but à de nombreuses difficultés pour monter et pérenniser leurs entreprises : les fonds de roulement notamment sont un véritable casse-tête dans la mode, puisqu’il faut un an pour rentabiliser son investissement en achat de matières et en production. Les stylistes en devenir, souvent bourrés de talent, ne sont pas forcément armés pour gérer une entreprise, aussi petite soit-elle. Au-delà des aides financières à la jeune création, que soutient notamment le Défi, des structures, entre incubateurs et coach entrepreneurial, sont des relais pour assurer la mode créative de demain. Elles créent des prix cotés pour accroitre la visibilité des stylistes. Souvent associatives, elles sont ultra dynamiques et prennent en main leurs poulains dans les régions françaises. Financées, selon les cas, par l’agglomération, la région, la ville et le Défi, elles sont toutes, également, à la recherche de financements privés pour avoir les coudées plus franches et élargir leur périmètre d’action. Le nerf de la guerre. Etat des lieux.
On ne présente plus la Mmm (Maison Mode Méditerranée) fondée à la fin des années quatre-vingt par Maryline Vigouroux (elle s’appelait alors l’Institut mode Méditerranée). Elle compte parmi ses 60 adhérents des marques confirmées, comme Gas, American Vintage ou Kaporal, autant de sponsors de l’organisme dont 66 pour cent des financements sont privés, le solde provenant de la Ville de Marseille, de Métropole Aix-Marseille-Provence, du Conseil Départemental 13, de la DRAC et de Chambre de Commerce). Sa gouvernance vient d’être renouvelée. Jina Luciani, après Matthieu Gamet est sa nouvelle présidente, aux côtés de la nouvelle directrice générale, Jayne Estève Curé. La première est diplômée du Fashion Institute of Technology à New York, avec un parcours mode international en tant que créatrice et formatrice. La seconde est diplômée de l'IFM et de l’ESIV. Elle sera au pilotage du développement global de la Mmm, notamment sur les pôles Formation, Innovation, Culture.
La Mmm a changé de gouvernance
La structure agit sur deux grands volets : ses missions de formations et son rôle culturel d’aide à la création. Sur ce dernier point, la Mmm a lancé en 2016 le festival Openmymed. *Celui-ci *a acquis une notoriété internationale, avec un jury international de vingt personnalités. Il fédère aujourd’hui une communauté de 104 créateurs dont le fil rouge est la Méditerranée. Des créateurs reconnus comme Jacquemus y ont participé. Ces jeunes talents sont parfois complétement extérieurs à la Mmm, qui élargit ses missions au-delà de ses « incubés ». Openmymed s’est rapidement imposé comme un vrai tremplin.
Mais la formation reste l’ingrédient indispensable à la renommée de la Mmm. Un pôle monté en partenariat avec l’Université Aix-Marseille qui délivre une licence, et des master 1 et 2 sur les métiers de la mode et du textile. 500 étudiants y ont été formés depuis 2006, dans des domaines aussi que le marketing, la production, la commercialisation, l’approvisionnement, etc.
Enfin, la maison s’attache à valoriser ses créateurs en leur offrant des vitrines : via le projet réalisé avec Mac Arthur Glen dans le centre commercial Miramas et le life store dans les Docks village). La Mmm explore aujourd’hui une nouvelle piste. Son dernier projet ? créer une « station M », à l’instar de la Station F parisienne : des incubateurs, des espaces de co-working, en lien avec des start-up innovantes, pour insuffler de nouveaux échanges.
L’hébergement. C’est justement la problématique sur laquelle se sont renforcés les Ateliers de Paris : incubateur, galerie d’expositions à son siège de la rue du Faubourg Saint-Antoine et services d’accompagnement à la création d’entreprises, les Ateliers de Paris sont tout cela à la fois, chapotés par la Direction de l’Attractivité et de L’Emploi de la Ville de Paris (Drac). Destinés aux Métiers d’Art, au Design et à la Mode, les Ateliers existent depuis 2005. L’hébergement est un de ses points forts : une quinzaine de places, des ateliers entre la rue Faidherbe dans le XI e et le Faubourg Saint-Antoine, à des prix défiants toute concurrence, accueillant des résidents diplômés des écoles d’art appliqués, de mode et de design. L’une des ambitions de la directrice, Françoise Seince, est d’augmenter le nombre de locaux, étant donné le nombre de nouveaux candidats chaque année.
Enfin, la structure participe au grand prix de la création de la ville de Paris, ainsi qu’à des événements médiatisés comme les Journées européennes des métiers d’arts et les Designer’s Days. Autant d’opportunité de visibilité pour les jeunes créateurs.
L’hébergement en résidence : une aide inestimable aux jeunes créateurs parisiens
A Lyon, le Village des créateurs, créé voici près de 20 ans avec la Ville de Lyon et les syndicats professionnels du secteur accompagne 80 marques. « Un accompagnement extrêmement personnalisé, sur des thématiques telles que l’entreprenariat, l’export, les aspects juridiques », souligne la directrice, Isabelle Gleize. La structure a pour vocation de détecter, d’accompagner et de propulser les créateurs de mode, déco et design-objet de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Elle compte 12 entreprises, des ateliers show-rooms dans le Passage Thiaffait, dans le quartier historique de la Croix-Rousse.
Autre service proposé, et non des moindre, la VDC B (village des créateurs boutiques, un concept-store dédié aux griffes fédérées, (une cinquantaine actuellement dans l’hyper - centre de Lyon). « Il monte en puissance, souligne la directrice, et cette boutique fait partie intégrante du dispositif de tremplin impulsé par le Village des Créateurs ». Au total, le Village a accompagné 310 entreprises depuis 2001, dont les deux tiers sont toujours en activité. Son concours Talents de Mode, lancé voici 13 ans, est de plus en plus coté. Présidé cette année par Frédéric Maus, il est remis ce 6 juin.
Le Village s’appuie également sur un « club des partenaires », dont le Centre technique du cuir, Esmod Lyon, Galeries Lafayette Lyon, pour des corners, le pôle de compétitivité Techtera… « Nous essayons de combiner les financements publics et privés», explique Isabelle Gleize.
Talents de Mode acquiert de plus en plus de notoriété
Enfin, Maisons de Mode, entre Lille et Roubaix, s’est dotée d’une nouvelle dirigeante l’année dernière, Emmanuelle Axer, fondatrice du concept store Série Noire. Celle-ci développe de nouveaux axes de travail : « Notre volonté est de s’ouvrir, de multiplier les rencontres avec l’écosystème de la mode et du textile de la région », souligne-t-elle. Encore une fois, il s’agit de trouver des financements privés, en plus de l’enveloppe publique dotée par la Région et la communauté urbaine. Des partenariats ont ainsi été montés avec le Musée de la Piscine (arts appliqués) de Roubaix, showroomprivé, (pour offrir des sites gratuits aux jeunes talents), La Redoute, ou encore avec certains commerçants de centre-ville. Chaque année, le Grand Prix Maisons de Mode d’un montant de 25 000 euros est remis au créateur le plus prometteur dans le cadre des 48 heures Maisons de Mode.
Aujourd’hui, l’association suit une trentaine de créateurs. Depuis dix ans, ce label a accompagné plus d’une centaine de marques, avec de vraies success story, telles que Le colonel moutarde, ou encore, la dernière en date, celle de Daniel Essa, jeune réfugié syrien créateur de sa marque de sneakers de luxe.
Enfin, Maisons de Mode fait partie du projet européen United Fashion, auquel participent également notamment Moda Lisboa, le Mad de Bruxelles (plateforme pour le rayonnement et le développement économique de la mode). Objectif, créer des échanges et des synergies, valoriser sa griffe dans les pays européens partenaires.
photo : les ateliers de paris, Jina Luciani présidente de la Mmm, openmymed