La mode dans les médias : le Black Friday entre promos et appels au boycott
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FashionUnited revient, chaque vendredi, sur un fait marquant de l’actualité mode. S’il était relativement toléré les années précédentes, cette année, le Black Friday fait face à une forte opposition avec des appels au boycott toujours plus nombreux.
Dans un communiqué datant d’octobre 2024, la Fédération nationale de l'habillement affirme sa position : « La FNH exprime son indignation face aux pratiques promotionnelles agressives des grands magasins en pleine saison. Alors que l’activité commerciale commence à peine à se redresser, les détaillants indépendants assistent, impuissants, à des réductions de -40% opérées par les grands magasins. Ces pratiques ont un impact destructeur sur les détaillants indépendants et les distributeurs multimarques en centre-ville, affaiblissant irrémédiablement le tissu commercial. C’est également un non-sens écologique. La FNH propose d’encadrer les promotions et de revoir la date des soldes pour éviter cette course effrénée aux réductions. »
La Fédération a également soutenu l’appel au boycott lancé contre cette journée de promotion. Un engagement que la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, Catherine Vautrin, dit « comprendre parfaitement ». « Nous sommes tous des consommateurs et je crois qu’il est important d’apporter du soutien aux commerces physiques. Souvenez-vous, durant la crise Covid, on se plaignait tous que nos commerces de proximité soient fermés. C’était si compliqué ! Suite à leur réouverture, nos concitoyens ont continué à y aller un peu et, petit à petit, ils sont repartis vers d’autres démarches de consommation. Or, il est très important de bien montrer la valeur créée sur chaque territoire, et la vertu des circuits courts », a-t-elle déclaré dans une interview accordée à L’Est Républicain.
20Minutes met en avant le sacrifice de certaines entreprises bien décidées à réduire l’attrait qu’ont les consommateurs pour cette journée : « Ce vendredi, eBay France a pris position. Aucune ristourne à prévoir sur les produits neufs à l’occasion du Black Friday, malgré des prévisions qui promettent encore un beau succès à cet évènement commercial mondial.(...) Dans le secteur de la mode émergent des initiatives similaires comme celle de Vestiaire Collective, plateforme de vente de produits de seconde main, qui a banni 27 marques d' "ultra fast fashion" à l’approche du Black Friday, laissant filer 5 % de son catalogue. Depuis 2018, les 500 structures qui composent le collectif du Green Friday participent à une vaste opération de boycott de l’événement, bannissant les remises de leurs boutiques et reversant 10 % de leur chiffre d’affaires de ce jour-là à des associations. »
Boycott du Black Friday, mode d’emploi
CMCM, média dédié à la seconde main, propose même une stratégie, en quatre étapes, pour réussir son boycott : « La première stratégie, que Marion Cas [consultante et ancienne directrice marketing chez L’Oréal] appelle Fair Friday, transforme le Black Friday en une opportunité de sensibilisation (...) Des marques comme Le Slip Français, émoi émoi et Vestiaire Collective adoptent cette approche. Le Slip Français, par exemple, redirige les revenus du Black Friday vers des associations caritatives, transformant l'achat en acte solidaire. (...) Certaines marques utilisent le Black Friday pour promouvoir une autre façon de consommer, centrée sur l’économie circulaire. Cette stratégie, que Marion Cas décrit comme le modèle circulaire, mise sur la réparation, l’achat de produits d’occasion ou reconditionnés (...) Certaines marques vont jusqu'à fermer boutique le jour du Black Friday, un geste qui peut sembler contre-intuitif mais qui vise à interpeller (...) Certaines marques choisissent de pratiquer des prix justes et transparents toute l’année, sans promotions pour le Black Friday. Marion Cas nomme cela la stratégie de l’anti-exclusivité ».
Au-delà de l’aspect responsable et financier mis en avant par ceux qui appellent au boycott du Black Friday, il y a aussi un aspect sociologique que décrit Flightgift : « Le Black Friday encourage les achats impulsifs et le consumérisme par des tactiques psychologiques en mettant en avant l'attrait de produits à prix réduits. Les entreprises créent stratégiquement un sentiment d'urgence en proposant des offres limitées dans le temps et en insistant sur le fait que ces réductions ne seront disponibles que pour une seule journée dans l'année (...) Le Black Friday génère souvent des remords chez les acheteurs pour plusieurs raisons. Tout d'abord, la pression exercée par les offres à durée limitée et le sentiment d'impuissance peuvent inciter les clients à acheter plus que de raison et de manière impulsive des articles dont ils n'ont pas vraiment besoin ou envie. Plus tard, lorsque l'excitation de la journée retombe, beaucoup regrettent leurs choix. »
Le blog Il était une Veggie précise les raisons pour lesquelles il est urgent d’arrêter ces achats impulsifs : « À l’heure où il n’est plus un secret pour personne que notre planète est en souffrance, (donc notre civilisation aussi, CQFD), une des directions à prendre le plus vite possible est de sortir de cette société de consommation. Arrêter d’acheter à tout va, sans réfléchir, sous l’impulsion de la promo alléchante (qui n’en ai pas forcément une) (...) Derrière l’acte de consommation, il faut prendre en compte le bilan carbone de chaque produit, les conditions des travailleurs (les droits humains et fondamentaux ont-ils été respectés par les employeurs), l’utilisation (et gaspillage) de ressources précieuses qui commencent déjà à manquer, le déchet en devenir etc, etc.. La surconsommation et la production accrue de déchets liées au Black Friday ont un impact environnemental considérable (...) Ce boycott est également un appel à conscientiser nos modes de consommation et sortir de cette frénésie d’achat dans laquelle nous sommes rentrés. »
Les initiatives de boycott du Black Friday sont nombreuses cette année. Reste à savoir si les consommateurs suivront la consigne.