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Le 35e festival de Hyères : un message de liberté créative et d'espoir

By Guest Contributor

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Hyères - L'année 2020 restera dans notre mémoire collective comme l’année des turbulences et des bouleversements. Depuis le début de la pandémie en février-mars, le monde entier s'est arrêté, suivi d'un confinement complet dans plus de 100 pays à travers le monde.

Le festival de mode et de photographies de Hyères, bien connu des professionnels de l'industrie et très attendu, a également été touché. Traditionnellement tenu fin avril / début mai dans les environs du sud de la France, sa 35e édition a été reportée du 15 au 18 octobre. Elle s'est déroulée selon des mesures d'hygiène strictes : éloignement social, masques, multiples stations de désinfectant pour les mains, enregistrement à l'entrée et réservations obligatoires pour tous les événements liés au festival.

La Villa Noailles, centre culturel et artistique de Hyères et monument important de l'architecture moderniste, était comme d'habitude le lieu principal du festival. Contrairement aux années précédentes, il était divisé en deux zones : une aire privée pour des membres de la presse et du jury où se déroulaient tous les défilés, concerts et discours, et une seconde zone pour les autres membres de la presse, les professionnels et les invités, ces derniers pouvaient alors visionner les événements en direct sur grand écran.

Même si la plupart des événements se sont déroulés techniquement à un seul endroit, vous ne pouviez pas vous empêcher de ressentir la séparation physique qui a finalement affecté l'atmosphère et l'énergie. Et même si les outils technologiques ont été utilisés pour rassembler virtuellement les gens, ils ne pouvaient pas remplacer la présence physique réelle et les expériences sociales réelles.

Les membres du Jury présents via Zoom

Plusieurs membres du jury n'ont pas pu assister physiquement au festival, c’est le cas pour le président du jury Mode Jonathan Anderson et le président du jury Photographie Paolo Roversi ainsi que Tim Blanks, Amanda Harlech, Tyler Mitchell pour n'en citer que quelques-uns. Ils ont rejoint le festival via Zoom. « Je ne quitterai plus jamais cette pièce, je pense… », a déclaré en plaisantant Tim Blanks, s’adressant aux autres membres du jury lors de l'appel Zoom depuis son domicile à Londres. Quant à ceux qui pouvaient physiquement assister au festival, ils étaient heureux d'être là et avaient envie de faire partie de quelque chose de très spécial.

Cette 35e édition du festival de Hyères a en effet été significative à bien des égards. Tout d'abord, elle a mis en évidence l'avenir incertain des événements de mode physique. Peuvent-ils exister en période de crises sanitaires majeures ? Ou seront-ils finalement remplacés par des événements uniquement numériques ? Ce sont des questions importantes pour une industrie qui repose fortement sur le réseautage et les connexions sociales.
Deuxièmement, le festival a clairement mis en avant la nécessité de trouver des moyens de continuer à encourager la création et la liberté créative, en particulier à une époque où nos libertés humaines fondamentales sont en jeu.
Ce fut un geste important et courageux de la part des organisateurs de faire en sorte que le festival se déroule malgré tout et à une époque telle que celle que nous vivons, c’est à dire sans précédent. C'était un message de soutien à la liberté créative et un message d'espoir.

« De toutes les années, celle-ci est la plus importante car le monde change… » a déclaré J.W. Anderson dans la conversation enregistrée avec Loic Prigent. Les designers participants partageaient le même état d'esprit. Ils ont parlé des luttes et des difficultés qu'eux et les organisateurs ont dû affronter pour que le festival ait lieu. Ils ont parlé de se battre pour cela. Et ils étaient reconnaissants d'être là et de pouvoir présenter les collections sur lesquelles ils ont travaillé pendant des années.

Il y avait une préoccupation commune concernant la planète et le changement climatique. Les designers ont parlé de trouver des moyens de produire des vêtements de qualité de manière durable. La plupart d'entre eux utilisaient des tissus recyclés, provenant de deadstock ou de dons. Ils ont utilisé du papier, des cordes, des attaches de câble en plastique, des oreillers, trouvés ou donnés, et les ont convertis en pièces portables qui brouillaient la frontière entre la mode et l'art. Il y avait un accent commun sur le fait main. Less is more, et "préférer la qualité à la quantité" étaient des concepts qu'ils ont adopté et préconisé. Leur énergie et leur volonté de faire de l'industrie et du monde en général un endroit meilleur étaient palpables et incroyablement inspirants.

Le travail des designers concurrents était chacun très unique, diversifié et enraciné dans leurs expériences et inspirations individuelles : de la crise des réfugiés (Timur Desdemoustier, Belgique) à la réinvention de la vie et de la garde-robe de Jeanne Baret, la première femme à faire le tour du monde ( Katarzyna Cichy, Pologne) au pouvoir de la musique (Maximilian Rittler, Autriche) ...

Tom van der Borght remporte le Grand Prix du festival de Hyères

Le prix principal de la mode a été annoncé par Jonathan Anderson par message vidéo dimanche après-midi le 18 octobre et attribué à Tom van der Borght de Belgique pour sa collection masculine de vêtements complexes et colorés slash objets d'art performatif. Van Borght utilisait des tissus, des cordes, des serre-câbles en plastique et des cristaux Swarovski pour ses looks qu'il appelait un nouveau type de haute couture. Il recevra une bourse de 20 mille euros, produira une collection avec les Métiers dʻart de Chanel d'une valeur allant jusqu'à 20 mille euros et présentera sa collection actuelle à la Mercedes Benz Fashion Week de Berlin en 2021. Van Borght a conquis le cœur tant du jury que du grand public puisqu'il a également remporté le prix du public de la ville de Hyères.

Emma Bruschi

La créatrice française Emma Bruschi a également reçu deux prix : le nouveau Prix Chanel 19M pour l'artisanat exceptionnel des pièces qu'elle a produites en collaboration avec la maison Lemarié et la bourse Mercedes-Benz pour sa démarche de développement durable, elle recevra une subvention de 20 mille euros pour produire une collection qui sera présentée l'année prochaine et recevra un soutien supplémentaire de Mercedes-Benz en 2021. Pour sa collection masculine, Emma a travaillé la paille, le lin et le raphia et a utilisé des techniques traditionnelles comme le crochet. Enfin, le prix Chloé a été décerné au créateur français Marvin M`Toumo qui recevra une bourse de 20 mille euros pour un trio composé d'un pantalon plissé, d'un soutien-gorge et d'une veste.

Cet article a initialement été écrit pour FashionUnited.com par Veronika Dorosheva. Il a été traduit et édité en français par Julia Garel.

Crédit : Étienne Tordoir / CatwalkPicture via 2e Bureau

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