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Poolday : portrait backstage d’une DNVB

By Julia Garel

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Mode |INTERVIEW

La marque est jeune, née sur Instagram en 2019, a un discours éco-responsable, une approche inclusive et manie les réseaux sociaux comme toute DNVB qui se respecte. Poolday, marque de maillots de bain pour femmes, reflète cette nouvelle génération de griffes à la cadence rapide, à l’unisson de ses consommateurs. Trois jeunes femmes et amies dirigent la société : Julia Desvignes, Gaëlle Ibrahim et Charlotte Brunel, toutes dans la vingtaine. Pour creuser un peu la stratégie d’une marque qui a déjà fait couler beaucoup d’encre, nous nous sommes entretenus avec la première, Julia Desvignes.

« Nous ne voulons pas grandir trop vite »

La marque n’a encore jamais eu recours à une levée de fonds. Son financement de départ s’est appuyé sur une société privée familiale. Trois apports en capitale ont été nécessaires. Le premier pour la création de la marque, afin de pouvoir financer les fournisseurs, modélistes, etc. ; le second lorsque les trois amies ont souhaité signer avec une agence de communication ; un troisième enfin pour l’ouverture de la boutique en mai 2020, alors que la France connaissait son premier déconfinement lié à la pandémie du Covid-19. « Nous ne voulons pas grandir trop vite » nous assure Julia par téléphone, « on préfère y aller step by step, garder un ADN familial, ne pas faire de levée de fonds était volontaire ».

Instagram au bout des doigts

Poolday a en effet quelque chose de « familial » et l’utilisation des réseaux sociaux n’est certainement pas étranger à cette approche. Julia, Gaëlle et Charlotte s’occupent du contenu Instagram ainsi que des réponses clients, tout le SAV est géré par elles. Julia a même installé un studio photo chez elle pour les shootings ainsi que pour les vidéos TikTok. Elle confie : « Pour TikTok on craignait que ça soit trop jeune et finalement on l’a lancé. On gère comme sur insta’, au feeling ».

La proximité de Poolday avec sa communauté tient également beaucoup à ses sondages. Cet outil bien utile proposé par Instagram consistant à poser une question à sa communauté via ses story, tout en lui soumettant plusieurs réponses possibles. La marque y a recours pour le lancement de ses produits afin de s’assurer des préférences de ses clientes. Enfin, à l’instar d’autres jeunes marques comme Réuni, Poolday considère sa clientèle comme une sorte d’actif de la société et s’appuie sur elle pour sa promotion. Les stories du compte Instagram enchaînent ainsi les reposts des photos prises par ses clientes habillées d’un maillot de bain Poolday.

Apprendre et rester agile

Pour ce qui est de l'organisation interne, Julia nous explique qu’il n’y a pas hiérarchie, « on peut prendre les décisions super rapidement » confie-t-elle. Au groupe d'amies s’ajoute toutefois un bureau d’étude de modélisme, une structure basée à Bordeaux. La décision a, semble-t-il, été prise après une mauvaise expérience avec une modéliste freelance dont l'utilisation des logiciels ne correspondait pas et a amené les jeunes femmes à devoir tout reprendre. Le parcours des DNVB est ainsi fait de rebondissements et d’erreurs qui aident à grandir.

Les risques sont néanmoins minimisés. Alors que de nombreuses marques doivent gérer le problème d’un stock massif d’invendus en raison du confinement, Poolday a, elle, assuré ses arrières en ne produisant qu’en petite quantité, un axe fort de leur ADN. « On essaie vraiment de lutter contre le phénomène de la fast fashion, l’idée est que les gens achètent un maillot et qu'ils le gardent plusieurs années. On ne veut pas que les gens s’achètent dix maillots par saison », déclare Julia. Ce qui ne veut pas dire que la marque n’ait pas de stocks sur les bras. Elle compte faire un corners soldes dans sa boutique (physique et en ligne) et envisage dans les mois à venir de travailler avec The Bradery, une jeune plateforme de ventes privées, avec qui elles sont en contact depuis un moment et dont l’approche responsable leur correspond.

« Par rapport à une marque qui prévoit deux ou trois ans à l’avance, nous, en faisant de petites quantités, on peut vraiment suivre les tendances du moment et cela nous permet d’avoir une courte durée de production entre le moment où l’idée éclot et le celui où le produit sort ». Le confinement déployant le marché du homewear, Poolday a donc rapidement mis en place sa collection de pièces d’intérieurs de seconde main. À ce sujet, Julia nous précise par mail : « Les vêtements viennent d'une grande friperie, se sont souvent des articles provenant des USA ou d'Italie : gros sweat ultra comfy made in USA style Fruit of the Loom, Hanes, des marques emblématiques et des produits qui méritent d'avoir une seconde vie... Quant aux petits cardigans, ils viennent souvent d'Italie ou de Hong Kong, toujours achetés à la pièce dans la même friperie. Ce sont des pièces de seconde main qui ont toutes été remises en état (lavage, repassage) par un groupe incroyables de femme qui travaillent pour un chantier d'insertion dynamique d'embauche : La Repasserie, Nous sommes ravies de travailler avec ce groupe de femmes ultra dynamique et de pouvoir participer à leur activité ».

En parallèle, Poolday a également lancé sa première ligne de homewear. Nous demandons à Julia comment la marque compte-t-elle se différencier dans un marché déjà bien dense. « On voudrait faire en sorte que ça soit vraiment un mélange de beachwear et de homewear », répond-elle. La ligne a en effet une importante influence beachwear, l’idée est, selon l’entrepreneuse, de se différencier sur les matières, peu importe le tour de hanches.

Les ventes en boutiques physiques

Mais comment une DNVB gère-t-elle l’ouverture de sa première boutique ? Comment une marque, habituée à une relation virtuelle avec sa clientèle, se confronte-t-elle à la vente physique ? Tout d’abord, la décoration a été entièrement faite par l’équipe elle-même, selon leur inspiration. Julia nous raconte ensuite qu’elles ont perçu une certaine corrélation entre le online et la boutique physique. « Au moment où on a ouvert la boutique, on a ressenti plus de ventes en ligne, cela a rassuré les clients. Et cet été on a plus vendu en boutique qu’en ligne. C’était aussi la pleine saison ». Elle ajoute : « on a vu que les clientes qui venaient acheter en boutique, achetaient ensuite sur internet ».

Tenant elle-même la boutique, les trois entrepreneuses ont pu rencontrer leurs clientes et apprendre à mieux la connaître. Lorsque nous demandons à Julia à quoi celle-ci ressemble, elle répond : « On était partie dans l’idée que les clientes allaient être des filles comme nous, de notre âge, avec un peu le même style. Mais au fur et à mesure, aussi en faisant des pop-up stores, on s’est rendu compte que l’on a pas de clientes types. On a des filles qui viennent avec leurs grand-mères, des filles simples sans style extravagant, des filles avec des looks plus pointus. Il y a tous les âges (...) On a des choses plus couvrantes et d’autres échancrées donc chaque femme peut trouver quelque chose ». Le prix des pièces débute à 95 euros, « ça n’est pas forcément une cliente qui a un énorme budget, mais une cliente qui veut acheter un produit de qualité qui dure et c’est quand même souvent des clientes qui s’orientent vers une manière de consommer assez responsable ».

Le rôle d’une marque aujourd’hui

Qu’est-ce que le rôle d’une marque selon une DNVB ? Pour Julia, « c’est d'être à l’écoute de ses clients, de ce qu’ils veulent, que ça soit au niveau des coupes ou des collaborations. Ensuite, en tant que jeune marque on a aussi le devoir d'être éco-responsable. si on doit choisir entre deux packagings on ne doit pas forcément se diriger vers le packaging le plus beau mais de se diriger vers le packaging le plus éco-responsable en essayant de le rendre beau. Je pense que ce sont des petits choix qui ont vraiment un impact. Pour une petite marque, c’est d’autant plus important de prendre de bonnes habitudes à ce niveau là. Après, y’a aussi un rôle au niveau inclusif (...) Tout le monde ne parle que de ça donc ça sera bizarre de ne pas le faire. C’est une obligation. Un jour on en parlera peut-être même plus, on indiquera pas que l’article est pour une poitrine généreuse, juste la taille. On ne veut pas que ça soit un acte marketing mais juste quelque chose de normal ».

De manière générale, le discours de Poolday rappelle celui du label d’entreprises à mission, une formule nouvelle, née de la loi PACTE et dont l’un des objectifs majeurs est de « repenser la place de l’entreprise dans la société », selon le site du ministère de l’Économie. Nous demandons à Julia son avis sur le label. « Nous sommes ravies de cette question ! Etant une jeune marque, nous sommes sans cesse tiraillées entre “proposer toujours des nouveautés pour être attrayant auprès du consommateur” et “nous poser, prendre notre temps, réfléchir et produire intelligemment, sans que cela soit dicté par les saisons”.

C'est assez hypocrite car quand des petites marques comme Alfie Paris (que nous vendons d'ailleurs dans notre boutique) prônent la non saisonnalité, elle est encouragée mais la réalité est que pour être attractif pour le consommateur, nous avons devons proposer des nouveautés à une vitesse effrénée, ce qui encourage les marques à avoir toujours plus de stocks. Ce que nous souhaitons : ralentir. Nous prônons le slow fashion depuis la création de Poolday, et ce que nous aimerions désormais, c'est ne pas être rythmé par les saisons. Nous ne voulons pas passer notre temps à courir pour produire plus mais prendre plus de temps pour faire les choses qui sont importantes pour nous, produire moins mais de manière toujours écologique et raisonnée. Pour nous être une marque à mission aujourd'hui c'est ça. »

Lorsque nous questionnons Julia sur les projets de la marque pour 2021, elle nous confie : « nous rapprocher encore plus de nos clientes avec plus de sondages, être aussi plus inclusifs, on va rajouter la taille XL et ensuite XXL, etc… (...) À terme, on veut utiliser que du 100 pour cent recyclé. On veut aussi développer notre réseau de points de vente. En termes de notoriété c’est important d’avoir un réseau de points de vente performants. Dans l’idéal, on aimerait beaucoup être présent dans de grands magasins comme les Galeries Lafayette Champs Élysées ou au Printemps ».

Crédit : Poolday

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