Une enquête révèle le greenwashing du géant H&M
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En mai 2021, Higg, une entreprise de logiciel qui aide les sociétés à mesurer leur impact environnemental, a créé des fiches d'évaluation dans le cadre de ses programmes Higg Sustainability Profiles et Higg Index Materials. Ces feuilles de scores offre un moyen standardisé de comparer les performances de différents produits et marques, permettant aux acheteurs d'identifier en un coup d'œil les produits ayant un impact environnemental réduit.
H&M, membre de la Sustainable Apparel Coalition (SAP) qui a mis au point la mesure Higg, utilise l'indice et les fiches d'évaluation depuis leur création. Ses produits vendus en ligne ont donc une note basée sur l'impact environnemental des matériaux utilisés pour les fabriquer. Mais voilà, selon une enquête menée par Quartz, une source d'information mondiale pour les professionnels, les scores environnementaux de H&M sont « trompeurs » et « carrément mensongers ».
Sur son site web, H&M détaille les mesures sous forme de scores allant de « baseline » à « 3 ». Les scores de base (« baseline ») sont attribués aux produits fabriqués à partir de matériaux conventionnels et les scores 1, 2 et 3 sont attribués aux produits fabriqués avec des matériaux ayant un impact environnemental moindre. Sur chaque produit, les clients verront également des données détaillées sur les impacts liés à la consommation d'eau, au réchauffement climatique, à l'utilisation de combustibles fossiles et à la pollution de l'eau.
Selon Quartz, plus de 50 pour cent des produits H&M ayant obtenu une note élevée et prétendant que les vêtements avaient un impact environnemental moindre n'étaient pas plus durables que des vêtements comparables fabriqués par des concurrents.
H&M a mal évalué ses produits
«H&M a affiché des données qui communiquaient une image totalement erronée de l'impact d'un vêtement sur l'environnement. Ces erreurs se sont produites parce que le site web du détaillant a ignoré les signes négatifs dans les scores de l'indice Higg. Par exemple, une robe dont le score d'utilisation de l'eau était de -20 pour cent – ce qui signifie qu'elle utilisait 20 pour cent d'eau de plus que la moyenne – était présentée sur le site web de H&M comme en utilisant 20 pour cent de moins », explique Quartz.
La semaine dernière, H&M a retiré toutes les fiches d'évaluation de son site web après que Quartz ait partagé ses conclusions.
La rapide réaction de H&M prouve peut-être que, même si les entreprises de fast fashion s'efforcent d'adopter des pratiques durables, le simple volume de marchandises qu'elles produisent n'est pas compatible avec la réduction de l'impact. C'est aussi ce que beaucoup considèrent comme du greenwashing. H&M a déclaré que les feuilles de scores visaient à faire preuve de transparence, mais l'indice Higg est confronté à une controverse après que H&M a été rappelé à l'ordre par l'agence norvégienne de protection des consommateurs en juin pour avoir trompé les clients et utilisé l'indice comme outil de marketing.
Anna Palmquist, spécialiste du développement durable au sein du groupe H&M Expansion, est chargée de piloter les performances des magasins en matière de développement durable. Elle indique sur une page dédiée du site web de l'enseigne : « Le Higg BRM est une évaluation de nos performances dans les différents domaines de nos opérations et nous sert de boussole pour savoir où nous devons nous concentrer ». Sur cette même page (à ce jour toujours accessible), H&M indique avoir obtenu un score global de 70,8 pour cent pour l'indice de Higg. Mais l'équipe produit de H&M a fait des erreurs de calcul ou avait l'intention d'induire en erreur avec les résultats surprenants qu'elle a publiés. Selon Quartz, plus de 100 fiches d'évaluation de vêtements pour femmes comportaient des erreurs.
Les fiches d'évaluation de Higg ne donnent pas une image complète de la situation
L'indice ne permet pas d'évaluer si les vêtements sont biodégradables ou si des microplastiques sont libérés. Philippa Grogan, d'Eco-Age, a déclaré au Sourcing Journal que l'indice Higg ne prend en compte qu'une partie sélective de l'évaluation de la durabilité des vêtements. Pour évaluer pleinement son cycle de vie et son impact, l’indice devrait, selon elle, être mesuré en tenant compte de la conception du produit à sa fin de vie, en passant par son exécution.
Lundi dernier, la Sustainable Apparel Coalition a déclaré qu'elle allait revoir d'urgence ses données et sa méthodologie. La dernière révision remonte à huit ans, en 2016. La SAC fait l'objet d'un examen de plus en plus minutieux depuis qu'elle défend les matériaux synthétiques fabriqués à partir de combustibles fossiles au détriment des fibres naturelles, comme la laine, le coton et même le cuir. L’organisation met par exemple en avant le polyester recyclé, un tissu synthétique bon marché que beaucoup de ses membres, comme H&M, utilisent dans leurs collections. Bien que le site web d’H&M ne dispose pas d'un moteur de recherche permettant de sélectionner les produits en fonction de leur matière, une recherche a permis de trouver plus de 10 000 articles contenant du polyester ou entièrement fabriqués en polyester.
Pour l'instant, la meilleure façon pour les consommateurs d'adopter le développement durable dans la mode est de moins acheter ou d'acheter des produits véritablement plus durables.
Cet article a initialement été publié sur FashionUnited.com. Il a été traduit et édité en français par Julia Garel.