La trentième édition des grands prix de la création de la ville de Paris salue la création textile

Cinq prix ont été remis à l’occasion de la trentième édition des grands prix de la création de la ville de Paris, en ce mardi 12 septembre 2023.

Coté mode, les lauréats sont Clara Daguin (Grand Prix) et Alice Vaillant (talent émergent). Bastien Beny et Simon Delacour remportent le prix des accessoires pour Domestique. Solenne Jolivet et Morgane Baroghel-Crucq gagnent le prix des Métiers d’Art. Enfin, Julie Richoz, et Juliette Berthonneau reçoivent le prix du Design.

Chacun d’entre eux touche la somme de 18 000 euros et une visibilité accrue, notamment à travers des expositions dédiées à la Mairie de Paris, à la galerie Joseph et à l’occasion des journées européennes du patrimoine (les 16 et 17 septembre 2023).

À travers ce choix, le jury récompense majoritairement des femmes (ce qui n’est pas toujours le cas dans un monde majoritairement dominé par des créateurs masculins), mais montre surtout l’importance de la matière, à une époque où l’on parle beaucoup de respect du corps (et donc du tissu qui l’habille), d’écoresponsabilité et de savoir-faire local. Ainsi, tous ces lauréats sont-ils munis de la (nécessaire) volonté de s’inscrire dans une work process innovant, vertueux et porteur de sens.

Lors de la conférence de presse, qui a précédé la remise officielle des prix, dans le prestigieux établissement de l’Hôtel de Ville, Olivia Polski, adjointe à la Mairie de Paris en charge du commerce, de l’artisanat, des professions libérales et des métiers d’art et de mode, explique aux professionnels présents que les choix ont été motivés par la créativité, l’aspect écoresponsable et le business plan. Lyne Cohen Solal, présidente du Fonds de dotation pour les Ateliers de Paris, salue les mécènes qui s’associent à ce prix.

Quant aux présidents des jurys - Inga Sempé (design), Jean-Charles de Castelbajac (mode) et Isabelle Stanislas (Métiers d’art) -, ils racontent leur propre parcours afin de faire le lien avec ce que les jeunes créateurs honorés peuvent apporter au système de la mode. « Ce qui m’a marqué, c’est cette foi et cette croyance que j’ai eu moi-même à mes débuts » signale Isabelle Stanislas.

Du savoir-faire au faire savoir, où l’utilité de récompenser les jeunes talents

Clara Daguin (Grand Prix) travaille autour de l’idée d’un corps augmenté en mêlant textile et électronique. L’idée ? Maîtriser l’interaction du vêtement pour le rendre communicatif, vivant et faire en sorte que « si vous lui parlez un petit peu, la robe lumineuse réagit ». « Elle électrise la haute couture, ses fils apportent de la lumière », dixit Jean-Charles de Castelbajac.

Alice Vaillant (Talent Émergent), ex-danseuse classique, tâche de se détacher du corps classique du ballet pour « déconstruire la rigidité », à travers des jeux et drapés de dentelles et broderies, dead stocks de la ville de Calais (bastion français du savoir-faire dentelles). « Je veux voir les femmes se sentir libres, fières de leur corps et de leurs différences » indique-t-elle. Alice Vaillant défile le 26 septembre, à 17 heures, dans le cadre de la Fashion Week Paris.

Bastien Beny et Simon Delacour pour Domestique questionnent l’objet usuel (un panier à provisions, dans le cas des modèles exposés) dans un rayon de deux kilomètres pour garantir un sourcing et une fabrication « made in Paris ». « On voit des métiers disparaître depuis quinze ans que nous sommes dans le métier » remarque Simon Delacour.

Les métiers d’art sont à la source de toutes choses, grâce à leur transversalité

Solenne Jolivet travaille le fil comme une peinture pour réinventer la surface textile, faisant se conjuguer art et artisanat dans une identité unique. « J’étais prête à ne rien vendre pendant six ans pour me laisser le temps d’expérimenter » avoue-t-elle.

Morgane Baroghel-Crucq, artisane textile spécialisée en tissage, part du principe que tout peut se tisser. Elle associe des fils de laine, soie, lin à des matériaux originaux comme des coquillages. Ce prix, qui signe dix ans d’activités, va lui permettre de se former à la technique du filage artisanal. « Dans ce milieu, nous sommes une famille, on ne se fait pas concurrence » remarque-t-elle, comme pour ouvrir les champs d’application du textile à d’autres univers, qu’ils soient matériels (la mode, mais pas que) ou géographiques (l’international ouvre des débouchés aux métiers d’excellence).

Juliette Berthonneau, designer textile 3D, travaille le concept d’un matériau tridimensionnel aux qualités structurelles : amortissant acoustique, isolant thermique ou lumineux, etc. Enfin, Julie Richoz, designer, s’inscrit dans une démarche, pas toujours facile avec les éditeurs, de séries limitées.