Jennyfer s’est relancé sur les très jeunes filles
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Un an après sa reprise par un pool d’actionnaires emmené par Sébastien Bismuth, l’enseigne française née en 1985 a joyeusement chahuté son logiciel. Nouvelle signature, nouvelles lignes de produits, collaborations avec des influenceuses idoles des ados, la marque a changé de visage.
C’était l’objectif et la vision de Sébastien Bismuth, dirigeant de la marque de lingerie Undiz entre 2012 et 2018, auparavant co-fondateur de MOA. Rendre les tendances du moment accessibles au plus grand nombre et transformer l’expérience d’achat en un moment ludique et décalé. Ancrer Jennyfer dans le « new retail », avec l’ambition que cette enseigne purement physique devienne une marque-média.
Et ça marche. Quand il reprend Jennyfer, Sébastien Bismuth veut en faire la marque référence des 15-21 ans. Soit rajeunir le cœur de cible, auparavant plutôt situé entre 20 et 29 ans. « Aujourd’hui, explique le dirigeant à FashionUnited, nous avons transformé cette entreprise. Jennyfer est devenu leader en France sur le créneau des moins de 18 ans. C’est le grand bouleversement de Jennyfer, souligne-t-il. Nous sommes leader dans un segment, avec des propositions différenciantes ».
Premier acte de ce relooking, une campagne nationale, en mai dernier, baptisée « Don’t call me Jennyfer » (D.C.M Jennyfer) accompagné du lancement d’une ligne ad hoc signée « Zéro Etiquette », qui est aujourd’hui la valeur principale de la marque. L’idée était de renverser les à priori sur la marque, de désamorcer son image un peu « cheap ». Jennyfer balaie les étiquettes, casse les stéréotypes et prône la diversité, le tout avec humour et auto-dérision. Créée par l’agence Buzzman, réputée pour ses campagnes devenues virales, elle affiche clairement l’ambition de Jennyfer : (re)devenir la marque des filles qui refusent les étiquettes et les stéréotypes et qui tracent leur propre route à l’abri des préjugés.
« Jennyfer, la marque des cagoles, des gamines, des boloss et des racailles ? Peut-être… Ou peut-être pas… Et peu importe, surtout », veut signifier l’enseigne. Le succès est immédiat. Fort de cette première réussite, la ligne « zéro étiquette devient une collection permanente, toujours renouvelée sous des thématiques différentes. (LGBT, Halloween, Noël, Genderless, féminisme, et autres) via des messages barrés sur les tops. (« bling bling », pistonnée, cagole…) qui parlent à la cible de Jennyfer. C’est ainsi qu’en juin 2019 le nouveau nom de l’enseigne et son nouveau positionnement sont nés, D.C.M Jennyfer.
D.M.C Jennyfer, une nouvelle signature de marque
« Notre différenciation, c’est de nous adresser de façon ciblée et spécifique à une clientèle de moins de 18 ans », explique encore Sébastien Bismuth. En créant d’une par une nouvelle notoriété de marque, et en faisant de Jennyfer l’enseigne de mode la plus complice pour qu’elle devienne la plus affinitaire auprès de la génération Z.
Et de fait, d’après une récente étude Kantar, Jennyfer est devenue leader sur les 10-14 ans en valeur entre septembre et janvier 2019, (versus le premier semestre 2018) devant Kiabi et H&M, tandis qu’elle se place en seconde position en volume. Sur le segment des 15 - 19 ans, Jennyfer occupe la quatrième place, derrière Zara, H&M et Pimkie, avec une part de marché en hausse. En terme de volume, elle est sur la seconde place du podium, très proche d’H&M. In fine, l’enseigne est en croissance et en cumul, leader sur les 10-19 ans mais en baisse sur les 20-29 ans, une inflexion souhaitée
« On dit que le retail est mort, mais c’est faux, bienvenue dans l’ère du néo retail, souligne encore Sébastien Bismuth. Les 10 -14 ans privilégient les magasins on online, ils n’ont pas de carte bleue et considèrent le shopping physique comme un loisir et une sortie entre copines. Jennyfer est en train de devenir une marque identitaire ».
L’enseigne aligne aujourd’hui 501 magasins dans le monde, dont 331 en France. « Nous opérons des réglages sur le parc, en fermant des petites surfaces, des magasins non rentables, mais ouvrons parallèlement des plus grandes boutiques, entre 400 et 600 mètres carrés », détaille le dirigeant. 20 pour cent des vitrines sont situées en centre-ville, le reste en centre commerciaux, dont deux dans les galeries des gares Saint Lazare et de la Gard du Nord. La dernière vitrine vient d’ouvrir à Dijon, dans le centre commercial de la Toison d’Or.
Ce repositionnement vers la tranche la plus jeune de la clientèle, s’appuie sur une communication digitale à 360 degrés. Opérer le coming-in digital de Jennyfer pour établir enfin un lien entre le digital et les magasins et faire de Jennyfer une marque média référence pour les jeunes femmes greffées à leur squad et à leur smartphone H24, étant l’objectif affiché, constituer une communauté de fans, cultiver un esprit inclusif.
Pour ce faire, Jennyfer travaille avec des influences en les intégrant à sa stratégie de marque. A commencer par Lena Situations et ses 850 000 followers sur Instagram. Au global, 18 influences collaborent aujourd’hui avec l’enseigne, dont Doll Beauty. Avec les deux très jeunes femmes, Jennyfer a signé des collaborations. Autant de bloggueuses qui ne sont pas des porte-manteaux payants mais de véritables partenaires qui incarnent la marque dans ses campagnes web et in-stores. Jennyfer a choisi des filles proches de ses clientes.
De façon générale, les réseaux sociaux promeuvent aujourd’hui un contenu plus axé sur le lifestyle. Depuis son lancement en mars dernier, la chaîne de Jennyfer sur Youtube, par exemple, a engrangé 1 million de vue. Elle est aussi forte de 1 million d’abonnés sur Instagram, soit plus du double de l’année dernière.
Revenir à l’esprit rebelle de la marque tout en la conjuguant aux réseaux sociaux
La politique de prix a également été revampée. Plus de promotions toutes les deux semaines et des prix moyens à la baisse. Jennyfer est actuellement la marque la moins chère sur le créneau des juniors. Une politique active de licences a par ailleurs été mise en place, notamment avec Disney et Nasa.
Au total, l’enseigne emploie aujourd’hui 2000 salariés pour un chiffre d’affaires de 360 millions d’euros. « Nous sommes une entreprise saine, sans dettes. Simplement, elle ne gagnait pas d’argent quand nous l’avons reprise et n’arrivait à se réinventer. Nous avons transformé Jennyfer », conclut Sébastien Bismuth.
Photo : Jennyfer, Sébastien Bismuth