La mode en force au Salone Del Mobile

La design week milanaise est colonisée par les marques de mode et les maisons de luxe qui tiennent à prouver l’étendue et la pertinence de leurs univers dans toutes expressions du goût.

Louis Vuitton est-il un maroquinier, un malletier ou une marque de mode ? Ni l’un ni l’autre. La locomotive du groupe LVMH est tout simplement une maison. Maison de luxe comme de bien entendu. Ce qualificatif, auquel tiennent comme la prunelle de leurs yeux les titans tels que Gucci, Dior, Cartier, Hermès ou Chanel éclaire la présence à Milan d’une myriade de noms qui ressemble comme deux gouttes d’eau au calendrier des fashion weeks.

Cette incursion, de plus en plus massive chaque année atteste une double ambition. La première concerne la volonté bien compréhensible d’étendre un périmètre de marque aux confins du lifestyle avec des lignes « casa » dédiées. Les Italiens avaient depuis longtemps ouvert le feu, notamment Fendi qui dès 1987 proposait à des designers spécialisés tels que Piero Lissoni ou Marcel Wanders d’imaginer meubles et autres objets de décoration. La seconde raison est plus philosophique. Il s’agit d’exalter le prestige global d’un univers qui ne se restreint pas à une seule catégorie d’items précieux, quitte à déborder sur la joaillerie, la beauté, la joaillerie, la lunetterie et plus récemment l’hôtellerie.

Seuls impératifs : la qualité des objets proposés et l’excellence du savoir-faire déployé. L’ère des licences, confiés pour un marché géographique délimité à des acteurs parfois obscurs, est terminé. L’esthétique est globale, la cohérence totale. À ces deux raisons s’ajoutent l’opportunité de développer une narration créative qui fait une large place à l’art et à l’architecture au sens large, dans le but d’enchâsser l’acte d’achat dans une expérience plus vaste, proche du parcours culturel. Le leitmotiv phare de ce nouveau paradigme : l’enrichissement intérieur.

800 initiatives au cœur de Milan

Cette osmose unissant excellence globale et expression inédite s’exprime pleinement à Milan du 17 au 23 avril avec cette semaine du design qui s’articule autour du Salone Di Mobile. Cette manifestation, qui fête sa 61eme édition attend plus de 300 000 visiteurs, abrite 2000 exposants dans les pavillons de Rho Fiera aux portes de la ville, tandis que le FuoriSalone, équivalent d’un calendrier off, ordonne plus de 800 initiatives au cœur de la capitale lombarde, entre présentations, expositions, happenings et conférences.

Parmi les maisons stars animant ce rendez-vous figure notamment Hermès qui dans ses locaux situés à La Pelota, Via Palermo développe une réflexion sur l’essentiel. Cette réflexion s’épanouit autour de matériaux aux lignes pures et de structures dépouillées d’ornementations superflues. Le Palazzo Orsini sert de cadre prestigieux à Giorgio Armani qui présente sa collection casa tandis que le Palazzo Isimbardi accueille le nouveau projet imaginé par Jonathan Anderson pour Loewe : des squelettes de chaises sont habillés à partir des tissus de la Maison. Jimmy Choo s’intéresse davantage aux vases avec une collection conçue en collaboration avec Venini qui réinvente le Poliedro en verre de Murano.

Au Teatro Filodrammatici de Milan, Prada invite avec Formafantasma à repenser le concept de déchet tandis que Dior poursuit plus classiquement sa collaboration avec Philippe Starck. Pollini de son côté met l’accent sur l’artisanat en accueillant dans sa boutique de via della Spiga une sculpture baptisée Mani d’Oro réalisée par la scénographe Elena Borghi à partir de chutes de cuir récupérées. Savoir-faire et excellence sont également les mots clés du projet initié par Tod’s en collaboration avec Tim Walker : le photographe a produit des clichés et des vidéos qui retracent, sur le ton de l’ironie et dans une ambiance proche du surréalisme, les phases de créations des produits phares de la marque. « Chaque image raconte une histoire de qualité et de tradition » prend bien soin de préciser le communiqué. Message reçu cinq sur cinq.