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« Made in France : les ateliers se regroupent pour répondre aux besoins des marques de luxe », Sylvie Chailloux

By Florence Julienne

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Salons |Interview

Sylvie Chailloux au salon Made in France Première Vision Credits: F. Julienne

Rencontrée au salon Made in France Première Vision, Sylvie Chailloux (Textile du Maine, Groupement de la Fabrication Française) commente l’évolution du secteur de la fabrication française et ses problématiques.

Les 27 et 28 mars 2024, le salon Made in France Première Vision a réuni 119 exposants français, dont 30 nouveaux, au Carreau du Temple (Paris), organisés en neuf pôles : services d’aide à la relocalisation, upcycling & recycling, matières premières & composants, tricotage & confection, confection (majoritaire), confection accessoires, technologie, services divers et organisations professionnels & formations.

Afin de mieux comprendre les enjeux du Made in France, FashionUnited a choisi d’interviewer une fidèle et active exposante, Sylvie Chailloux, cogérante de l’atelier de fabrication indépendant Textile du Maine, entreprise du patrimoine vivant, spécialisée dans le prêt-à-porter féminin de couturier, et présidente du Groupement de la Fabrication Française, dont la vocation est de préserver, fédérer, défendre, valoriser le savoir-faire français.

Qu’est-ce que le salon Made in France Première Vision apporte à la profession ?

C’est un lieu de réseautage. En deux jours, nous rencontrons de nombreux clients. Si nous devions organiser tous ces rendez-vous dans l’année, nous n’aurions pas assez de temps. Nous avons beaucoup évolué dans la présentation de nos stands et le salon nous offre de nombreux services. Ainsi, les organisateurs ont mis en place un service pour cibler une clientèle potentielle.

Comment évolue le secteur de la confection ?

Depuis 2023, nous assistons à une concentration des ateliers. Il y a eu beaucoup de départs des dirigeants et les groupes de fabrication ont, globalement, racheté, tous les ateliers qui étaient à vendre. Il y a, par exemple, Les Ateliers Grandis, Les Ateliers FIM, Groupe JYB, les Ateliers Pierre Nogales, tous quatre exposants au salon Made in France Première Vision mars 2024. Mais aussi, le groupe Franaud ou le groupe AB Couture*. Les donneurs d’ordre ont incité les professionnels à s’intéresser aux reprises des ateliers. En contrepartie, plusieurs groupes se sont vus offrir des partenariats de parts au capital, c’est un fait récent et significatif.

Quel est le but des donneurs d’ordre (majoritairement des marques de luxe) de rentrer au capital des groupes de fabrication français ?

L'objectif affiché est de consolider le parc de fabricants français, leur besoin étant la préservation des savoir-faire et des capacités de production, en France. Ils encouragent les reprises par des acteurs professionnels de la fabrication pour consolider notre secteur. Les relations nouées avec les maisons de luxe françaises sont possibles, car nous partageons les mêmes valeurs : la passion, le travail bien fait, le respect de nos engagements.

Quid des ateliers qui souhaitent rester indépendants ?

Il en reste, comme nous, par exemple, Textile du Maine. À travers les rachats effectués ces dernières années, je pense que les groupes de luxe sont intéressés par des savoir-faire extrêmement poussés ou par des entrepreneurs qui veulent gérer une capacité de production significative en volume. Les indépendants peuvent se différencier par leur agilité à traiter de plus petites séries, par complémentarité des groupes.

Les problématiques sont-elles les mêmes entre un groupe de confection et un atelier indépendant ?

Quelle que soit la structure, notre ressource est le capital humain. Les machines à coudre ne tournent pas toutes seules. Les postes de découpes ont été automatisés, mais la fabrication (couture à la main, à la machine et repassage) reste une activité manufacturière. Nous sommes confrontés à de nombreux départs en retraite et une arrivée sur le marché de jeunes, formés au métier de l’habillement, mais qui ont besoin de trouver un sens à ce qu’ils font.

Au Groupement de la Fabrication Française, dont je suis la présidente, nous avons travaillé sur la marque « Employeur », pour expliquer que nous avions des valeurs, à l’image de chaque chef d’entreprise : une dimension humaine pour des métiers de la main. Nous avons bâti des politiques de formation, recrutement, politique salariale pour expliquer aux salariés les conditions dans lesquels ils bénéficiaient d’évolution de carrière. Indépendants ou en groupe, nous nous battons tous pour avoir des moyens de former.

Qu’a dit la ministre déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, Olivia Grégoire, à ce sujet lors de sa participation au premier jour du salon et à la conférence sur les nouveaux partenariats gagnants ?

« Faites-moi des propositions, que vous manque-t-il ? ». Le problème est qu’il n’y a pas de moyens, nous connaissons tous le budget contraint de l’État. Les métiers du luxe ont démontré qu’ils étaient essentiels à la balance du commerce extérieur français, mais, à l’opposé de l’automobile ou de l’aéronautique, nous ne sommes pas considérés. La ministre, qui a toujours été attirée par la mode, a un discours différent et auditionne beaucoup d’acteurs pour mieux identifier les pistes de travail. D’où le projet du Plan Mode en cours de préparation, accéléré face à la disparition de nombreux acteurs de la distribution.

Quelle est votre première problématique ?

Le financement de la formation. Avec la réforme sur les opérateurs de compétences, nous avons beaucoup perdu. Pour vous expliquer : les entreprises paient une taxe de formation qui était autrefois versée à un organisme qui répartissait les fonds collectés directement dans les entreprises. Le gouvernement a décidé que ce fonds de formation serait versé dans un fonds commun, nommé France Compétences. L’idée est de flécher des moyens aux régions pour former les personnes éloignées de l’emploi et répondre aux besoins des entreprises (plan plein emploi). Je suis désolée, mais, avec des opérateurs qui ne sont pas aussi concernés que nous le sommes, cela ne fonctionne pas. Le meilleur acteur, c'est celui qui sait.

*À propos des groupes de fabrication

  • Les Ateliers Grandis, artisans fabricants de vêtements de luxe
  • Les Ateliers FIM, réseau de façonniers français au service du luxe
  • Groupe JY BH, vêtements et accessoires de luxe et haut de gamme masculins et féminins
  • Les Ateliers Pierre Nogales, spécialisés dans le prêt-à-porter féminin de luxe travaillant exclusivement pour des maisons Haute Couture parisienne.
  • Groupe Franaud, prêt-à-porter de luxe
  • Groupe AB Couture, façonniers prêt-à-porter de luxe et bureau d'études

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