Bangladesh: vers une nouvelle donne?
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Concernant
Avec cette nouvelle donne, tous les yeux sont désormais tournés vers le sud-est asiatique ( le Bangladesh tout spécialement mais aussi le Sri Lanka et le Vietnam) : le Bangladesh est devenu le deuxième fournisseur de l’Union européenne en passant de 8 à 13 pour cent de part de marché en 5 ans : une hausse méritée car le pays offre des métiers circulaires de très haut niveau, on y trouve de bons teinturiers et les nouvelles technologies s’y sont largement installées. De plus, le pays dépend pour une très large part des exportations de textile habillement qui tirent sa croissance. La distance enfin : le Bangladesh est plus près de nous que Shanghai.
Les salaires ont fortement augmenté depuis 2012
Le drame de Dacca qui a largement occupé l’espace médiatique au printemps dernier a sans doute occulté cette phase de croissance en pointant du doigt à juste titre les conditions précaires de la classe ouvrière. Sur un T-shirt vendu 29 euros en Occident, l’ouvrier asiatique qui l’a fabriqué gagne 18 centimes, estime l’ONG Fair Wear Foundation. Le chiffre peut troubler mais il ne doit pas faire oublier que les salaires ont malgré tout fortement augmenté depuis 2012. En Asie, l’augmentation globale atteint + 15 pour cent en un an, ce qui rend le différentiel entre les salaires asiatiques et ceux pratiqués dans les pays proches de l’Europe (où la hausse est que de l’ordre de 3 à 5 pour cent) moins important. Concrètement, le Bangladesh et le Vietnam ont des coûts de production analogues à ceux de la Moldavie par exemple, entre 250 et 300 dollars par mois, l’Indonésie, 200 dollars. Un salaire chinois sur la zone côtière s’apprécie à 360 dollars, un salaire turque à 650 dollars.
Peu
de candidats au fonds d’indemnisation
Le drame n’a pas changé les habitudes de consommations européennes mais il a suffisamment marqué les esprits pour que les grands groupes donneurs d’ordres adoptent une communication de crises.
La première réponse - en dehors du fonds d’urgence débloqué par Primark dans les mois qui ont suivi le drame - a été le fonds d’indemnisation des victimes. Le 24 decembre dernier, ce fond a enfin été constitué. 40 millions de dollars. Officiellement, l’irlandais Primark, l’espagnol El Cortes, le canadien Loblaw et le britannique Bonmarché ont annoncé leur participation à ce fonds. Les paiements commenceront à être versés en février, mais le montant alloué par chaque firme reste encore à déterminer. Selon le New York Times qui cite des officiels engagés dans les négociations, les familles des défunts recevront 25 000 dollars de dédommagement en moyenne. Les blessés bénéficieront quant à eux de compensations.
Concrètement, sur les 29 grands groupes internationaux de l’habillement qui faisaient travailler les ateliers hébergés dans l’immeuble qui s’est effondré, seuls 4 d’entre eux ont donc officiellement annoncé leur participation au fonds d’indemnisation. Un déséquilibre que n’a pas manqué de remarquer le New York Times qui signale que Walmart, Iconix, JC Penney, Dress Barn, Cato Fashions, Children’s Place pour ne citer que les groupes américains auxquels on pourrait cependant rajouter C&A ou encore Mango, Auchan, Carrefour, Camaïeu ou Teddy Smith, aucun de ces groupes ne s’est engagé à dédommager les victimes, ou les familles des défunts. Camaïeu s’était engagé en juin dernier à indemniser les victimes mais sa participation n’a pour l’instant pas officialisé. Notons enfin que Quelques semaines après le drame, les ONG et les syndicats avaient impulsé un accord sur la sureté dans les usines. Parmi les 31 signataires, Carrefour est le seul français.
Au final, si le drame n’a pas provoqué une onde de choc spectaculaire auprès des consommateurs Européens, il a cependant initié une vague de grèves qui a largement agité le sud du continent asiatique en 2013. Au Cambodge, une grève nationale a réuni le 27 décembre des dizaines de milliers d’ouvriers du textile qui exigeaient le doublement de leur salaire mensuel. De crainte que ces mouvements de grosse ampleur n’entachent leur image, les maisons mères du prêt-à-porter sont désormais plus tentées de demander aux pays dans lesquels ils sous-traitent d’augmenter le salaire minimum.