Clap de fin pour l'atelier des marques Jourdan et Kélian ?
loading...
Après le textile, la chaussure haut de gamme made in France serait-elle la prochaine à disparaître progressivement du paysage des savoir-faire du
Les deux griffes, reprises par le groupe Royer en 2008 pour la première et 2007 pour la seconde, avaient permis au numéro un français de la chaussure sous licence (Converse, New Balance ...) de mettre en place un Pôle Luxe en 2010 et de nommer à sa tête Véronique Guéritot. A l'époque, celle-ci annonçait que les deux marques devaient trouver leur rentabilité en 2011. Mais en 2012, la crise est passée par là et le groupe Royer enregistrait des pertes. Aussi, il décide en 2013 de se recentrer sur son site historique de Bretagne fermant le site de production de l'entreprise de chaussures enfant Mod 8 situé à Blanquefort près de Bordeaux. Aujourd'hui, c'est donc au tour de l'atelier de Bourg de Péage de subir le même sort. « De nos jours, vendre des articles de luxe nécessite de développer des boutiques en propre, d'avoir une égérie. Cela demande beaucoup d'investissements, sans compter le coût de l'atelier et nous ne pouvons plus assumer seul tout cela, explique un porte-parole au sein du groupe Royer. La solution est de s'adosser à un partenaire financier ou un nom du luxe. Nous sommes prêts à céder la majorité du capitale si les investissements sont significatifs. Mais depuis juillet dernier, le repreneur se fait attendre...
Oui à la vente des marques, non à la fermeture de l'atelier !
En première ligne, l'atelier de Bourg de Péage va donc fermer ses portes vendredi 28 février non sans que ses salariés se soient battus. Ainsi, depuis l'annonce de la fermeture, trois d'entre eux se sont mobilisés auprès de Jacques Royer, le PDG du groupe familial Royer, pour obtenir son accord quant à la cession du parc des machines et d'une partie du stock des matières premières et composants. Objectif : que l'atelier survive à la vente. Rencontré en juillet dernier, le dirigeant a donné son accord formalisé par un protocole. Dans la foulée, un projet d'entreprise avec un statut SCOP prend forme essayant de sauvegarder les 22 emplois. Ici, aucune production n'était prévue au départ, celle-ci étant d'abord externalisée en Espagne, puis en Italie. Néanmoins, compte-tenu des difficultés à mettre en place une traçabilité, un suivi et des résultats qualitatifs, le Groupe a décidé de rapatrier toute la production en France. L'atelier a été étoffé et des personnes issues des anciennes sociétés de Stéphane Kélian et Charles Jourdan ont été embauchées, explique un responsable de l'atelier dans le métier depuis 25 ans. Résultat : depuis 2009 Bourg de Péage réalise environ 80 % de la production des souliers Charles Jourdan et Stéphane Kélian, sachant qu'une partie continuait d'être confiée en Italie puisque la capacité de l'atelier ne permettait pas d'absorber le volume total à produire, soit 14 000 paires vendues par an.Oui mais voilà, sans fonds assez élevés pour valider la confiance des Banques, pas de soutient. On nous a demandé de compresser notre effectif ; on l'a fait en ne prévoyant de ne conserver que 11 emplois. On nous a demandé d'augmenter notre apport en capital ; on l'a fait. Dans ce projet, on a les machines et les matières et on a même les clients !, s'insurge le responsable. De fait dès 2012, le groupe Royer voit bien l'importance pour son Pôle Luxe de se diversifier s'il veut dynamiser son projet et le pérenniser. Un rôle qu'a su tenir l'atelier car d'autres créateurs choisi de lui faire confiance comme Gordana Dimitrijevic, Erick Schaix, Apologie, Kadra Kaline ou Amélie Pichard. J'ai quitté une usine en Espagne pour le site de Bourg de Péage car je suis attachée au made in France même si cela me coûte un peu plus cher par paire de chaussures, confie la jeune femme. Aujourd'hui, il y a de réels manques en France et des attentes pour la fabrication du moyen/haut de gamme et personne ne vient apporter son soutient à ce projet de SCOP, je trouve cela révoltant.
L'appel est donc lancé, il y a urgence ! Quand on voit la réussite de la relance de Robert Clergerie et de Repetto qui ont remis sur le devant de la scène le made in France, pourquoi ne pourrait-il pas en être de même pour l'atelier de Bourg de Péage ?
Céline Vautard