Le réveil de Courrèges
By FashionUnited
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Marque à l'ombre"
Rencontrer les nouveaux propriétaires de cette légende est forcement enthousiasmant, pour plusieurs raisons. Tout d'abord parce qu'ils ont été élus - plutôt que choisis. Quand André Courreges se retire en 1994, la maison reste entre les mains de son épouse Coqueline. Elle refuse de vendre à qui que ce soit, les propositions ne manquent pourtant pas. Les griffes possédant un tel degré de notoriété à l'échelle mondiale sont rares et les grands groupes sont évidemment aux aguets.Mais il ne saurait être question de galvauder le prestige moral de la maison en la cédant à des faiseurs de luxe et des fabricants de it-bag à la chaîne. Car si la marque s'est endormie, elle ne s'est pas abîmée. Son esprit souffle toujours sur les collections des grandes griffes de la mode et du luxe (il suffit de jeter un œil sur le printemps été de Prada pour s'en convaincre) et sa philosophie - le design au service d'un monde meilleur - est plus pertinente que jamais. En lisant un édito de Jacques intitulé "marque à l’ombre", Jacquelines Courrèges a un éclair, elle sait qu'elle a trouvé plus que des repreneurs: des garants. Deux ans d'échanges, le temps de nouer une véritable amitié, et la reprise s' effectue fin 2010.
"Courrèges peut s'exprimer partout"
Le développement de Courrèges. Vaste entreprise soumise à de passionnantes réflexions. La marque a tout fait et pourtant, tout reste à faire encore. Car l'essence même de la griffe lui permet de se déployer dans tous les domaines où le design pose son empreinte. André Courrèges avant d'être couturier, fut ingénieur. Son but n'était pas de créer des vêtements mais de changer le monde. La finalité ultime de ses inventions consistait, en associant fonctionnalité et esthétique, à créer de la vie, ni plus ni moins. C'est à dire que Courrèges peut s'exprimer partout. Si en 1965, la griffe balayait toutes les conventions et faisait sa révolution à grands coups de lignes géométriques, de tons acidulés, de petits blousons courts en vinyle, de mini-robe trapèze, elle trouvait aussi son expression dans la conception de voitures électriques, une folie à l'époque, une bénédiction aujourd'hui. "Ce que tout le monde fait aujourd’hui pour des questions d’argent, André et Coqueline le faisaient avant, et par conviction profonde", analyse Frédéric.
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Cette élégance se fonde puissamment sur un savoir faire d'exception, extrêmement rare, infusé dans le site palois par 15 couturières récemment honorées par la visite de la ministre Aurelie Filippetti. Certaines sont entrées chez Courrèges en 1969. Un atelier haute couture, dont les habitants de Pau sont très fiers, et sur lequel les deux dirigeants ont décidé de s'appuyer pour un déploiement international. S'appuyer sur une "main" made in France chèrement préservée, sur un patrimoine intact et sur un système de création global unique - pas de styliste star qui fait trois petits tours et puis s'en va - est une adéquation suffisamment inédite pour être soulignée. "La maison est pure" souligne Jacques. Pur, le mot est simple et pourtant il frappe et laisse songeur. Il place haut la barre de la conviction.
"Porter un vêtement Courrèges, ça doit signifier quelque chose"
Quant à la présentation et aux rythmes des collections, ne comptez pas sur eux pour s'engager dans d'arrogantes dépenses somptuaires. Pas de défilés mais des vêtements livrés au compte goutte, quand ils sont prêts, sans se soucier du galop infernal auquel la mode actuelle a décidé de courir. "André Courréges mettait un temps certain pour créer ses vêtements car il voulait que tout soit pensé, réfléchi, utile à la femme. Rien ne devait être gratuit. Il faut dire qu'il avait fait ses classes chez Cristobal Balenciaga. Aussi, porter un vêtement Courrèges, ça doit signifier quelque chose, comme si la cliente devenait la porte parole d'une éthique et d'un art de vivre, explique Frédéric. Nous respectons cette démarche, non par dévotion mais parce qu'elle nous a convaincu par son intelligence." Au fond, Jacques Bungert et Frédéric Torloting nous racontent une autre histoire de mode où les yeux ne sont pas continuellement fixés sur les cours de la bourse mais sur le produit. Ils nous rappellent que le temps est le seul luxe véritable.
Alain Mikli
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Courrèges
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Jacques Bungert