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Les Atelières : « Le Made in France est une fumisterie »

By FashionUnited

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Muriel Pernin ne décolère pas. L'atelier de corsetterie 100 pour 100 made in France dont elle est lafondatrice présidente va devoir fermer et pourtant les commandes sont là. La société coopérative d'intérêt collectif (SCIC), située à Villeurbanne,  atteste avoir déjà reçu des commandes de 14 à 15.000 pièces,

pour un total de 35.000 pièces prévues dans l'année.



 
De quoi faire vivre les 30 salariés regroupés par Muriel Pernin. La communicante s'était émue l'année dernière du sort des ouvrières licenciées par Lejaby alors en liquidation. Elle avait alors décidé de faire perdurer le savoir-faire de ces couturières-corsetières en créant << Les Atelières >>. La réponse financière du public à la souscription lancée sur les réseaux sociaux avait permis de lancer l'affaire et de recruter 25 couturières parmi une centaine de candidates, dont des ex-Lejaby. L'un des clients des Atelières était d'ailleurs <<Maison Lejaby>>, nouveau nom donné à Lejaby après sa reprise par l'entrepreneur Alain Prost, qui avait conservé 195 salariés sur plus de 400.

  Seulement voilà, les commandes ne suffisent pas, il faut aussi financer l'activité, ne serait-ce que son fonds de roulement. Et c'est là où le bât blesse : les banques ne suivent pas. En désespoir de cause, Muriel Pernin, va demander sa liquidation vendredi devant le tribunal de commerce de Lyon.

  << la BPI est l'instrument des grands groupes et ne rend pas service aux PME >>
 <<Dans notre pays, les banques sont plus fortes que la République. Avec notre argent, elles exécutent chaque jour des dizaines de PME. Ce sont Les Atelières qui montent aujourd'hui à la guillotine>>, explique la présidente de la SCIC. Même la Banque Publique d'Investissement, dont le but et la justification est de financer l'activité des PME lâchées par les banques répond que la société ne remplit pas les critères d'aides car elle n'a pas de fonds propres. "La BPI n'aide que les entreprises qui n'ont pas consommé leurs fonds propres alors que c'est justement quand on a besoin d'aide qu'on se tourne vers elle", relève la chef d'entreprise, "cette clause exclut nombre de PME à potentiel qui ont besoin de temps, la BPI est l'instrument des grands groupes et ne rend pas service aux PME alors que ce sont les PME qui créent l'emploi en France. Ceux qui, comme moi, ont espéré en la BPI ont été leurrés."

Deux soutiens cependant trouvent grâce aux yeux de la dirigeante : celui du préfet du Rhône Jean-François Carenco, et du président de la région Jean-Jack Queyranne. Il manque les 585 000 euros du fonds de revitalisation proposé et soutenu par Jean-François Carenco, mais aussi par plusieurs grandes entreprises. "Hélas, deux banques s'y opposent, ce qui remet en cause l'ensemble de notre montage financier, regrette Muriel Pernin. C'est d'autant plus rageant que cet argent n'est pas celui des banques, mais celui d'entreprises."

 Elle regrette également que la BPI ne reconnaisse que l'innovation technologique et l'intervention d'ingénieurs, alors que Les Atelières travaillent avec les chercheurs de l'INSA sur de l'innovation organisationnelle portée par des ouvrières : "Nous étions en train de mettre au point un modèle à mi-chemin entre la production à la chaîne et l'artisanat, mais ce mode d'innovation n'est pas reconnu par la BPI. Dans notre pays, les personnes valent moins que les robots."

Le made in France n'exige pas que le produit soit entièrement réalisé en France
Derrière la chute de cette PME se glisse en filigrane le dossier du Made In France si ardemment soutenu par le ministre du Redressement productif. Le made in France n'exige pas que le produit soit entièrement réalisé en France. << Quand  on achète du made in France, ce sont souvent des produits fabriqués à l'étranger et finalisés en France avec une simple étiquette cousue en France", explique la présidente de la coopérative. <<Nous avons souffert de la désorganisation de la filière corsetière et textile et des marques>>. Les commandes de tissus et de fournitures ne peuvent se faire en circuit court mais à l'étranger avec des délais souvent aléatoires. <<Les habitudes de payer des services à bas coût au Maghreb et en Asie ont faussé les relations entre clients et fournisseurs>>. Et d'ajouter : << Est-ce que l'État a envie que la filière corsetière existe en France ?" avant de conclure, consternée : "Le Made in France est la plus grande fumisterie qui soit".
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