Interview : La mode de seconde main selon Elephant vintage store

By Julia Garel

28 août 2023

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Business|Interview
Frédéric Marc Marion / Devanture du magasin Elephant vintage store. Credits: Elephant vintage store.

Elephant vintage store fait partie de ces acteurs spécialisés qui rafraîchissent la mode de seconde main. Basée à Lyon et présente à Paris, la société étend son activité à travers plusieurs branches, intégrant dans ses équipes de vente des passionnés et des experts de la mode vintage formés sur les spécificités des pièces par le directeur et fondateur Frédéric Marc Marion.

FashionUnited : Pourriez-vous présenter votre activité ?

Frédéric Marc Marion : En 2011, j’ai créé Elephant vintage store à Lyon. L’idée, c’était d’ouvrir une boutique qui dépoussière l’image des magasins de vintage habituels en proposant une sélection de vêtements de qualité mise en avant par un merchandising lisible et cohérent. L’économie circulaire est au cœur de notre activité, et nous avons pour objectif d’amener notre clientèle à consommer responsable tout en lui offrant une expérience d’achat agréable.

L’entreprise est organisée autour de trois piliers. D’abord, la vente en magasin avec notre boutique historique Elephant vintage store, mais aussi Elephanteau vintage, notre magasin de vintage à prix réduit, ainsi que deux concessions, l’une chez Citadium Lyon et l’autre au Printemps Haussmann à Paris, dans leur espace de seconde main (7eme Ciel). Ensuite, la vente sur notre site Internet elephantvintage.com. Et enfin, le Bazar Des Poilus, notre activité de vente BtoB de vêtements populaires français des années 1800 à 1960, un segment de niche. Nos clients sont principalement des revendeurs japonais et des designers de grandes marques internationales qui aiment s’inspirer des coupes et des matières de ces pièces.

Quel est votre business plan ?

J’ai toujours consommé de la seconde main. J'ai commencé mon activité professionnelle dans le vintage à la fin de l’année 2005. À cette époque, j'achetais d’anciens stocks de magasins et je sélectionnais des pièces dans des points de vente de vintage pour alimenter ma boutique en ligne.

Durant cette période, j’ai visité un nombre incalculable de magasins de vintage dans le monde entier et mon constat était simple : si l’on n’aime pas chiner ou que l’on n’a pas la patience, un magasin de mode vintage ou de seconde main est généralement désagréable.

C’est avec ce raisonnement que j’ai créé Elephant vintage store. Le but était de présenter des articles de seconde main de façon claire, comme pourrait le faire un magasin de prêt-à-porter classique, pour que les clients s’y retrouvent, même si c’est leur première expérience de shopping vintage.

Nous souhaitons que chaque client entrant dans le magasin puisse trouver son bonheur. Ça passe par un travail de sélection des produits extrêmement poussé et par le conseil. Par exemple, on retrouve dans nos magasins des « brand corners » de produits intemporels tels que les jeans Levis des années 70-90, les polos Lacoste, les manteaux et trenchs Burberry, les chemises Ralph Lauren, etc. À cela s'ajoutent des sélections de pièces plus trendy ou pointues.

Et pour que notre large clientèle soit toujours accompagnée au mieux, notre équipe de vente est constituée de passionnés et d’experts de la mode vintage, régulièrement formés sur les spécificités des produits que nous proposons.

Intérieur Elephant Vintage Store. Credits: Elephant Vintage Store.

Votre chiffre d'affaires est-il en hausse ? Quels sont vos objectifs de croissance ?

Oui, ces trois dernières années, nous connaissons une très forte hausse de notre chiffre d’affaires. Cela s’explique par l’évolution des mentalités vis-à-vis de la surconsommation, du recyclage, de l’écologie. Pour la nouvelle génération d’acheteurs, la clé de l’impact positif, c’est la prolongation de la vie d’un objet.

« nous avons le projet de nous développer avec d’autres boutiques dans plusieurs villes françaises l’année prochaine. »

Frederic Marc Marion

Bien sûr, nous avons des objectifs de croissance. Nous allons continuer le développement de nos ventes en ligne grâce à notre nouveau site Internet, qui verra le jour dans les prochains mois. Et du côté des boutiques physiques, cette année, nous avons eu la chance de nous installer dans la rue de la République, artère commerciale principale du centre de Lyon. Ce magasin test nous a permis d'éprouver - avec succès - notre concept sur une clientèle encore plus diversifiée. Du coup, nous avons le projet de nous développer avec d’autres boutiques dans plusieurs villes françaises l’année prochaine en suivant le même schéma.

Comment calculez-vous le prix des articles que vous revendez et la marge ?

Le prix de vente de nos articles s’appuie sur trois critères bien précis : notre prix d’achat, la qualité et le design du produit, la rareté de celui-ci sur le marché.

Quelle(s) difficulté(s) rencontrez-vous en tant que vendeurs de seconde main ?

Des freins de vente, nous en rencontrons de moins en moins. Comme je l’ai dit, les habitudes d’achat de seconde main se sont démocratisées. En revanche, j’imagine que sur le marché mondial, l’achat pourrait devenir plus difficile ces prochaines années.

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Comment organisez-vous votre chine ?

Les achats sont très importants pour un magasin de vintage. Les tendances changent très rapidement dans le vintage aussi. Pour qu’un magasin fonctionne, il est primordial d’acheter au bon moment, à bon prix et avec une profondeur de gamme suffisante pour éviter la pénurie. Je m’occupe des achats, cela demande beaucoup de recherche et beaucoup d’énergie. Heureusement, j’ai eu la chance de commencer tôt, ce qui m’a permis de connaître très bien ce marché et de tisser un large réseau de partenaires sérieux.

Quelles marques seront en vogue demain ?

On est en plein retour des années 2000 avec le style Y2K. Si l’on garde comme principe que les modes reviennent tous les 15/20 ans, il serait logique de bientôt revoir les jeans slim des Baby Rockers refaire surface. Je vois aussi un retour de Marithé + François Girbaud et j’imagine que Dolce & Gabbana devrait revenir.

Comment voyez-vous le marché du vintage et de la seconde main dans cinq ans ?

La seconde main connaît une forte progression et ce n’est que le début. Elle a tout pour séduire : réellement écologique, souvent plus abordable, et elle offre une diversité de styles incomparable. Si on en croit les études, le marché mondial des vêtements d'occasion croît trois fois plus vite en moyenne que le marché mondial des vêtements dans son ensemble. En gros, on est face à une ruée vers l’or, et tout le monde veut sa part du gâteau. Ce qui amène beaucoup de nouveaux acteurs sur le marché avec des concepts très pertinents, mais aussi, malheureusement, son lot d’arrivistes et d’adeptes du greenwashing.

La seconde main va changer, va s’affirmer et s’affiner. Il va y avoir de plus en plus de magasins et de sites spécialisés, à l’image du marché du vêtement en général. Pour moi, quand les marques ou les grands acteurs de l'industrie arriveront véritablement à comprendre et à valoriser la seconde main, on aura enfin une transformation intéressante de notre marché.

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Cette interview a été réalisée par mail.

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