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Le Ghana en a assez d’être la poubelle textile du monde

By Florence Julienne

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Image: Ecotextile.com

La Fondation Or a participé à une opération de sensibilisation au Forum des Halles (Paris) pour dénoncer la surconsommation de vêtements de pays riches et, par extension, la pollution qu’elle génère au Ghana.

C’est à Paris que notre confrère, Laury-Anne Cholez, de Reporterre a rencontré Daniel Mawuli Quist, membre de la Fondation Or dont la mission est de proposer des alternatives au modèle dominant de la mode, qui oppose la prospérité écologique à la destruction, et invitent les citoyens à vivre la mode, au-delà de leur rôle de consommateur. L'entrepreneur, spécialisé dans le recyclage de vêtements, lui confie : « on ne sait jamais ce qu’on va trouver à l’intérieur des balles de vêtements. Parfois, 70 pour cent de la marchandise est inutilisable et c’est de pire en pire. Sur l’ensemble des habits usagés envoyé au Ghana, près de 40 pour cent finissent dans les décharges ou dans la mer. Nous sommes ici pour réveiller les consciences et faire comprendre aux gens du Nord que leurs habitudes de consommation délétères ont des conséquences ». Ici, comprenez sous la canopée du Forum des Halles où 1 000 kilos de vêtements ont été déversés suite à l’appel du collectif « Le bruit qui court », le jeudi 24 novembre 2022, à la veille du Black Friday, pour sensibiliser les consommateurs.

D’après Reporterre, le Ghana est en effet l’un des principaux pays importateurs de vêtements de seconde main. Chaque semaine, près de 15 millions d’articles se retrouvent sur le marché de Kantamanto, où travaillent près de trente mille personnes, la France y exportant 510 tonnes chaque année. « Il y a une trentaine d’années, ce système a permis à des gens de sortir de la pauvreté. Aujourd’hui cela ne marche plus, les vêtements sont de trop mauvaise qualité. Nous avons tous des dettes à la banque. D’autant qu’il y a une inflation très forte » explique le Ghanéen

Pourquoi le Ghana est devenu la friperie du monde

« C’est à cause du colonialisme, affirme Liz Ricketts, cofondatrice et directrice de la fondation Or. À l’époque de la domination britannique, il était obligatoire de porter des habits occidentaux pour se rendre à l’église ou à l’école. Cela a créé une demande artificielle pour ce type de vêtements. Ces marchandises coûtant cher, les Ghanéens achetaient d’occasion. Après l’indépendance en 1957, cette habitude est restée. Un débouché pratique pour l’industrie naissante de la fast fashion, qui s’est développée de concert avec celle des centres commerciaux. » Autrement dit, sous couvert d’aider les pays les plus pauvres en recyclant leurs restes, les pays riches sont surtout en train de créer une catastrophe écologique et économique. « Lorsqu’il pleut, le courant emporte tous les vêtements non collectés dans la mer. Quand vous allez sur nos plages, c’est terrible. Les tortues ne pouvant plus déposer les œufs sur la plage, elles ne viennent plus » déplore Solomon Nuetey Noi-Adzeman, le directeur du département chargé de la gestion des déchets d’Accra, la capitale du Ghana.

Dixit Reporterre, les producteurs sont censés payer une taxe à l’éco-organisme Refashion sur le principe du « pollueur payeur ». Soit 51,1 millions d’euros en 2021 pour gérer la fin de vie des vieux habits. Or, les fonds récoltés restent en France, alors que les vêtements eux sont exportés. « Nous avons demandé que ReFashion donne des financements aux vingt premiers pays vers lesquels la France exporte ses vêtements. Nous avons été déçus par le manque d’urgence exprimé par le ministère de l’Écologie. Chaque minute où le gouvernement n’agit pas, les habitants de Kantamanto s’endettent toujours plus, les vêtements débordent dans les écosystèmes fragiles et les pays du Sud continuent de gérer un gâchis qu’ils n’ont pas contribué à créer, conclut Liz Ricketts. De toute façon, quels que soient les efforts ou les investissements favorisant le recyclage ou le réemploi, la seule solution pour s’en sortir, c’est que l’industrie de la mode accepte de produire moins ».

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