État d’urgence sanitaire : les commerçants « non essentiels » devront payer leurs loyers
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La cour de cassation a statué. Malgré les nombreux confinements liés au Covid-19 durant les deux dernières années, les commerçants dit « non essentiels » ont l’obligation de payer leurs loyers.
Durant deux ans, les commerçants en France ont vu leurs revenus baisser drastiquement à cause notamment des fermetures à répétition liées à la pandémie de Covid-19. Dès le premier confinement, les commerçants dit « non essentiels » ont été contraints de ne plus accueillir de public dans leurs locaux. Cela s’est répété à plusieurs reprises au cours des 24 derniers mois, en fonction de l’évolution de la pandémie dans l’Hexagone. Face à l’arrêt de leurs activités et donc de leurs sources de revenus, de nombreux commerçants ont suspendu le paiement de leurs loyers. Une décision qui n’est pas passée du côté des bailleurs qui ont décidé de saisir la justice afin d’obtenir le paiement des loyers.
Face à ces cas inédits, que dit la loi ?
Saisie par plus d’une trentaine de pourvois, la troisième chambre de la Cour de cassation en a traité trois en priorité estimant qu’« ils lui offraient l’opportunité de répondre à des questions de principe posées par cette situation ». Ainsi, la Cour a décidé que les mesures de sécurité prises par le gouvernement pour lutter contre la propagation de la Covid-19 ne permet pas aux locataires de ne pas respecter les clauses du contrat les liant aux bailleurs puisqu’il s’agissait « d’une interdiction générale et temporaire, qui avait pour seul objectif de préserver la santé publique et qui était sans lien direct avec la destination du local loué telle que prévue par le contrat ».
La décision précise que « l’interdiction de recevoir du public en période de crise sanitaire ne pouvait être assimilée à une perte de la chose louée au sens de l’article 1722 du code civil ». Les commerçants n’étaient pas non plus en droit de demander une réduction de leur loyer puisque « la mesure générale de police administrative portant interdiction de recevoir du public n’est pas constitutive d’une inexécution par le bailleur de son obligation de délivrance ».
Pour appuyer cette décision, les juges se sont aussi basés sur une note du ministère de l’Économie, des finances et de la relance relative à l’impact de la crise sanitaire sur les loyers des commerces.
Il en ressort que jusqu’à 45 pour cent des établissements du commerce de détail ont été fermés durant la crise ; le montant total des loyers et charges locatives ainsi immobilisés est estimé à plus de trois milliards d’euros ; ces entreprises ont pu bénéficier de trois dispositifs d’aides successifs (fonds de solidarité, coûts fixes et aide loyers), ainsi que d’autres mesures de soutien.
Selon la Cour, les commerçants ne peuvent pas non plus se prévaloir du mécanisme de l’exception d’inexécution pour suspendre le paiement de leurs loyers. « Il résulte de l'article 1218 du code civil que le créancier qui n'a pu profiter de la contrepartie à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat ou la suspension de son obligation en invoquant la force majeure. Dès lors, la cour d’appel a exactement retenu que le locataire, créancier de l’obligation de délivrance de la chose louée, n’était pas fondé à invoquer à son profit la force majeure », mentionnent-ils.
Pour rappel, la Cour de cassation a rendu ses décisions le 30 juin 2022 suite aux audiences des 14 et 15 juin 2022.